La quatrième Issue (The Raging Tide) (1951) de George Sherman

On commence à être un familier du George puisque Gols a vu une douzaine de ses westerns (sur les 3245 qu'il a réalisés) et que j'en suis pour ma part à mon second film noir du sieur (je suis de nature plus modeste, c'est vrai ; ok j'ai vu aussi deux ou trois westerns du gars). On est chez le petit artisan, hein, chez un modeste, qui remplit a minima, ici tout du moins, son cahier des charges (le film relevant d'ailleurs plus du genre humide que du genre noir). Il a tout de même le bon goût de s'entourer de Richard Conte, un type que j'aime tout particulièrement. Conte, après un départ trépidant (une belle course dans la nuit de San Francisco où il passe devant chez Tarantino !!!), se retrouve le bec dans l'eau : il a commis un meurtre, a appelé la police pour qu'elle vienne sur les lieux, et se rue donc comme un dingue chez sa douce pour avoir un alibi... Problème, elle ne lui ouvre pas la porte, diable ! Les issues sur route sont rapidement bloquées, sauf, of course, la quatrième, la voie marine... Il se cache donc sur un bateau de pêcheurs (Charles Bickford et son fiston Alex Nicol, des migrants du norrrrd de l'Eurrrope) avec lesquels il va sympathiser ; il trouve en Charles un second père et en Alex un type qui va pouvoir, sur terre, faire le taff à sa place (récupérer des prêts...). La police, qui surveille de près la donzelle de Richard (Shelley Winters, qui me laisse toujours aussi froid) et les clodos du coin, patine dans son enquête... Le petit hic (car il y a toujours un hic, un maillon faible) semble devoir venir du gars Alex : non seulement, d'après Richard, il ne respecte guère son père, mais il commence surtout de tourner un peu trop autour de Shelley... Richard va-t-il finir par péter un plomb ou trouver miraculeusement la voie de la rédemption ?

On se frotte les mains avec ce début tonitruant, on va vite les remettre dans nos poches... Au niveau de l'action, on devra en effet se contenter d'une baston et... d'une tempête en mer (le titre anglais devant bien se justifier). C'est mou... On devra donc trouver son petit plaisir, cette fois, dans le portrait du personnage principal toujours sur la brèche : le Richard oscille entre cette nouvelle vie sur le rafiot, auprès d'un type qui le prend sous son aile, et son ancienne vie sur terre, ses conneries, ses amours. On sent qu'il a la larme à l'oeil dès que le Charles sait trouver les mots pour le traiter comme un fils, mais on sent bien, aussi, qu'il a toujours le sang chaud : il n'est donc pas franchement à l'abri, sur un coup de dé, de faire voler en éclat sa couverture. Sherman, au niveau du "devenir" de son personnage principal, tient assez bien le suspense pour le coup puisqu'on ne sait trop, quasiment jusqu'au bout, ce que le Richard est capable d'entreprendre (va-t-il enfin faire preuve d'empathie ou ne penser qu'à sa petite gueule ?)... Bon, au-delà de ça, c'est quand même un peu la portion congrue : Charles en vieux marin cool, Alex en petit jeunot tête brûlée un peu concon, Stephen McNally en flic décontracté et même si on ajoute la tronche du vieux loup de mer de John McIntire et l'armada hirsute des clochards du quai, on ne peut pas dire qu'on ne soit pas dans l'ensemble sur un terrain un peu trop balisé... Certes cette tempête en mer, tout en transparences au niveau des effets spéciaux, est assez bien rendu mais avouons qu'on s'attendait à un peu plus de coups de feu et de coups de sang - il faudra se contenter de coups de vent, de bourrasque... Pour les fans de Conte, un noir bien dilué sinon.