Voici une œuvre mexicaine apparemment remarquée (une petite mention spéciale) lors du dernier festival Cannes - film en sélection dans la section Un Certain Regard. Noche de Fuego nous emmène dans une sorte de no man's land mexicain contrôlé par les cartels de la drogue. Si les gens du coin ont pour principale activité la récolte du pavot (ooooopium...), un autre souci majeur plane sur leur vie courante : les razzias de jeunes filles... Chaque mère semble soucieuse de ce danger et notre petite héroïne, en particulier, a très tôt appris les bons réflexes pour se dissimuler rapidement en cas de rapine... En attendant cette éventuelle horreur, notre chtite adolescente partage son temps entre l'école et ses deux meilleurs copines. Si elle est parfois directement témoin d'exaction, voire de meurtre, si elle subit comme un véritable trauma le fait de devoir se couper les cheveux très court, elle essaie malgré tout de profiter de quelques petits instants d'insouciance - un bal, une baignade, ou encore ce curieux jeu qui consiste à deviner les pensées de ses amies ; leur complicité est évidente, tout autant que le danger qui se rapproche d'elle de jour en jour...

Alors oui, si le sujet traité ici est forcément louable (de la barbarie de nos temps modernes, une barbarie qui est loin de faire la une de l'actu), la façon qu'a Huezo de nous présenter son récit affaiblit un poil son impact : on met un peu de temps pour cerner vraiment les tenants et les aboutissants de cette histoire (on progresse en allusion, sans rentrer directement dans les débats quant aux dangers qui menacent cette petite communauté). Si ce tact, cette tactique du petit pas, évitent de nous confronter de façon trop bourrine avec ce sujet, il a un peu tendance à en diluer la force... On s'attarde sur la petite vie de notre héroïne, sur ses petits jeux adolescents et la mollesse du rythme d'ensemble tend à nous faire perdre de vue l'essentiel de la chose : la folie absolue des cartels et de leurs actes aveugles. On suit d'un oeil un peu morne la vie de ce trio d'ados jusqu'à ce qu'on comprenne de quelle nature est l'épée de Damoclès qui plane sur leur vie - on sent qu'on devra inéluctablement serrer des fesses dans les cinq dernières minutes mais en attendant on se fait un peu endormir par ces petites saynètes un peu flous ; Huezo a le sens, certes, de la belle image (dans cette montagne isolée), ce cadre un rien idyllique ne pouvant que contraster (le cas échéant...) avec la violence de ce cartel. Dommage que l'on se perde un peu en route dans ce récit un peu longuet, un peu mollasson et surtout, lors de ce final traumatique annoncé, que l'on ne parvienne pas à ressentir pleinement toute les sentiments de cette héroïne sous le choc. Soigné dans la forme, bon enfant au niveau des métaphores (le bonhomme de bric et de broc construit par l'héroïne) mais un peu fade et attendu émotionnellement.

Prayers for the Stolen (Noche de fuego) (2021) de Tatiana Huezo

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