Voilà un petit polar noir espagnol qui n'est pas sans faire penser à l'ambiance (voire aux personnages avec ce duo de flics qui passent leur temps à faire la gueule : l'un (Jean Réno en maigre) au passé trouble (surnommé "Le corbeau" dans les forces policières sous Franco : pas bon signe), l'autre (Sean Pean en faux) au futur amer (il va devenir père et le doute l'assaille)) de True Detective. Ce n'est pas une mauvaise référence en soi ; l'on prend ainsi un certain plaisir à se perdre dans ces paysages tortueux de marais hispanisant (magnifiques plans en plongée, vus, au moins, de Soyouz), à faire connaissance avec ces personnages torves (journaliste opportuniste, trafiquants de drogue glauques, père de famille louche...), à suivre les entrelacs de cette intrigue un brin complexe (conflits d'intérêt avec les trafiquants, une police qui respire la corruption, des proxénètes en quête de chair fraîche...). La photo gris-cendrée a un certain cachet et la petite musique de fond devient rapidement entêtante... On comprend que dans cette Espagne post Franquiste, les frontières entre impunité et justice demeurent étroites et l’on n’est pas au bout de nos surprises dans cette enquête où certains pontes (voire certains policiers) semblent avoir certains passe-droits. Pas mal donc, de ce point de vue, et la chose se suit avec un certain plaisir comme devant un bon petit travail d'artisan local (je ne saurais dire, par ailleurs, à quand remonte mon dernier film espagnol... depuis que je ne prends même plus la peine de regarder le dernier Almodovar, ça doit faire un bail). Le final est, comme souvent dans ces cas-là (une intrigue si complexe en apparence qui se réduit finalement à deux-trois quidams), un peu décevant malgré une ultime séquence sous la pluie relativement moite et violente. Un ptit polar maison a minima, c'est déjà pas si mal quand on s'appelle Rodriguez.

La Isla mínima (2015) de Alberto Rodriguez

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