Eté 39, une adolescente, un trou provincial (l'Auvergne et ses volcans sont annoncés et cela a été tourné... près d'Avignon - ah ouais, d'accord, pour le soleil, non ?), Simone Signoret en teneuse de bar, Huster, Balmer, Weber au casting... Dis donc dis donc, cela fleure bon le téléfilm France 3 vintage, non ? Eh bien non, puisqu'il s'agit d'un film de Jeanne Moreau qui ressemble en fait à s'y méprendre... à un téléfilm France 3. Oui, parfois on ose s'aventurer sur des sentiers inconnus et on se fourvoie un peu. Cela commence pourtant de façon fort primesautière avec cette voix off de Jeanne qui nous emmène en vacances, en province, le temps d'un dernier été de paix. Une ado de 12 ans, Marie, qui observe son corps s'épanouir, se dit que le temps de la prime amourette est sûrement venu. On voit ce corps en formation (heureusement, female gaze pudique de Jeanne lors de ces plans sur ce corps dénudé qui aujourd'hui... ne seraient plus possibles) et l'esprit de la donzelle qui se fixe... sur Huster - oups. Alors oui, on serre un peu des fesses dès le départ quand on voit Balmer, et ses gros sabots, qu'il fabrique, serrer la jeune fillette d'un peu trop près (la perversité n'ira pas plus loin - ouf) et on se demande un temps si Huster saura garder ses distances avec cette donzelle qui le colle... Soyez rassuré, tout se passera bien, Huster choisissant de jeter son dévolu... sur la mère de Marie... qui est pourtant mariée avec le jaloux Weber mais bon sang, il n'avait qu'à point partir faire les moissons chez ses cousins... Bon vous l'avez compris, ou quasi, il sera ici question de l'éveil de l'amour chez l'ado, et de l'éveil d'une autre vie possible chez la mère... le temps d'un été (et sa torpeur), une dernière opportunité pour se sentir libre puisque la guerre gronde... Des gamins qui s'ébattent dans les foins, Signoret et son air ronchon mais si gentille au fond, des tromperies dans les bois, des incontournables provinciales passionnants (la naissance d'un bâtard, la mort d'un vieux malade, les jalousies, les on-dit...), et pour clore le tour un petit bal sur un air d'accordéon qui vient célébrer la fin de l'été et se termine en baston... on peut dire que Moreau enfile les clichés du genre avec une allégresse jamais démentie. Tout est banal, attendu, déjà vu ou lu mille fois. Elle a certes des acteurs de premier ou de seconds plans qui sont solides (bon, Huster quand même, nuançons), une ado qui ne surjoue pas trop, et cette lumière qui, au détour d'une scène, surfe sur la campagne mais on reste tout de même bien en peine pour cueillir là-dedans une quelconque idée, un quelconque plan, un quelconque personnage original (ah, Michel Blanc en dragueur, admettons). Un regard sur l'éveil adolescent lisse comme une poêle en téflon, le second et dernier essai de Moreau dernière la caméra, on lui saura gré d'avoir arrêté là les frais.

L'Adolescente (1979) de Jeanne Moreau

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