Sokurov rencontre 24h chrono en Allemagne ? Mouais, ça veut pas dire grand-chose. Disons donc simplement, pour commencer, as the French say, that it is a real "touuur de fooorce" puisque ce film a été tourné en un seul plan séquence sur 130 minutes (sans trucage pas comme dans le Birdman sans patte). Y'a-t-il un intérêt à la chose au-delà de la simple prouesse ? On pourrait dire oui, en un sens, puisqu'on assiste avant tout à la façon dont une jeune femme d'origine espagnole sympathise in Berlin avec quatre allemands éméchés : le fait de voir dans sa continuité comment ce petit monde fait connaissance, communique et serre les liens a du sens. D'autant qu'en un rien de temps ils vont devoir faire preuve de cohésion puisqu'ils se voient "presser" par une bande de malfrats de réaliser un braquage (l'un des quatre allemands a fait de la prison et a quelques dettes...). Le plan-séquence prend également toute sa valeur lors de la panique éprouvée lors de la cavale (d'autant que la jeune femme s'est apparemment vraiment trompée de route par rapport au scénar, mettant en péril toute la prise (il en a fallu trois en tout pour l'anecdote) : on sent la sueur froide) et de la chasse à l'homme mené par les flics qui se retrouvent vite à leur trousse – le cameraman mérite un prix à lui tout seul. Bon, donc, ce petit jeu n'est pas totalement vain, reconnaissons-le.

Maintenant, même si Schipper fait beaucoup moins le malin qu'Inarritu en filmant simplement à hauteur d’homme sans tenter des acrobaties de cameraman à la con ou à la Lelouch (c'est selon), il faut bien avouer que l'ensemble traîne parfois un peu en longueur et qu'on aurait volontiers apprécié, c'est un comble, quelques coupes (oui, on est pénible, c'est dit). Schipper laisse parfois des longues plages s'éternisaient (la séquence sur le toit, puis dans le café, puis dans le garage, puis en boîte, puis... bref) sans que cela soit vraiment nécessaire pour apporter un réel élément intéressant. Il se donne le temps, me direz-vous, et c'est tout à son honneur... Mouais, on sent tout de même que le scénar manque un peu de chevilles, et du coup de furieuses baisses de régime sont à constater ici ou là (Bon bordel, ils vont le faire ce braquage ! (braquage que Schipper a d'ailleurs l'audace de ne pas filmer... c'est osé, certes, mais un peu frustrant - comme s'il se plaisait à ne garder que les temps morts). Bref un pari risqué techniquement réussi mais qui ne rapporte finalement pas grand-chose, si on voulait filer la métaphore... Une belle sortie nocturne dans les rues de Berlin qui part en vrille (le plus) mais durant laquelle on s'emmerde parfois un brin (le moins). Une semi-victoria en quelque sorte...

Victoria (2015) de Sebastian Schipper

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