Le titre français eut été L'attaque de la Gelée de Groseille dans un Bled paumé qu'on n’aurait pas trouvé à redire. Danger planétaire a forcément un peu plus de gueule mais trompe un peu sur la marchandise. Il était donc une fois Steve McQueen (certes beau mais mauvais comme un cochon pour exprimer l'effroi (des grimaces d'un autre monde), la panique (il mord son poing, le gars !)) qui vit tomber du ciel un soir d’été, alors même qu’il ne pensait qu’à serrer sa poule, un drôle d’étoile filante. La chose, pour ne pas dire the Thing, se révèle être un joli petit caillou renfermant une substance qui se rapproche, à première vue, à du sperme de gnou. Un vieil homme, sans doute trop curieux, s'amusant avec la substance, en fera les frais : la matière saute sur son poing et le bouffera complétement... Il est le premier d'une longue série que le Blob absorbera : une infirmière, un docteur (toujours au premier front), un garagiste (toujours ce sens du sacrifice) suivront... La gelée de groseille prend de l'ampleur et ne tarde pas à faire la taille d'une cinquantaine de pots Bonne Maman. Face à ce danger terrible, Steve est là : il alerte les pouvoirs publics (va fumer ailleurs, jeune con), ses potes, cherche à mettre toute la population en alerte ; il surjoue mais il ne baisse jamais les bras face à la menace ! Steve, l'homme au sang chaud, contre le Blob, la chose qui ne supportait pas le froid : il n'y en aura qu'un qui survivra.

Alors oui, on peut avoir une certaine nostalgie envers ces petits films d'horreur des fifties qui savaient donner du temps au temps. Ici, rien ne sert de trop s'intéresser à l'horreur de la gelée. Yeaworth prend une sorte de malin plaisir à faire trainer le suspens ; Steve vient tout juste de transporter chez le docteur un vieille homme avec le poing bouffée par de la gelée ignoble : il croise une bande de jeunes et c'est parti pour une petite discute de dix minutes, une compète en voiture, des chambrages entre jeunes... Le Blob se tourne les pouces pendant ce temps... On entre ensuite dans le commissariat de police... On apprend qu'un flic aime à jouer aux échecs pendant ses permanences ; dès que ses collègues sont partis, il prend sa radio et reprend la partie avec un collègue : on s'attarde, on s'attarde et pendant ce temps le Blob fait de la gelée... Comme si finalement ce putain de Blob n'était que secondaire : Yeaworth serait-il le plus grand cinéaste social de son temps ? On déconne un brin mais faut reconnaître qu'il ne se passe pas non plus grand-chose. Les femmes (quelle bande de tourtes quand même) ont le chic, dès qu'elle voit le Blob, de partir en courant et de se fracasser la tronche deux mètres plus loin (ah ben la femme et la panique, je te raconte pas - c'est pour cela aussi qu'elles s'évanouissent comme des courges : aucun sens de la pression) ; les flics se montrent suspicieux comme tout face à l'alerte donnée par les jeunes et mettent trois heures pour intervenir (quoi, un gilet jaune a brûlé une caisse ? Mais noooon, ils sont pacifiques, les bougres) ; le Blob lui, qu'on voit presque jamais (il bave à 1km/h, la menace infernale), finit par gagner une salle de cinéma où se joue un film d'horreur (mise en abyme, magnifique) et met dehors un public qui paye de s'être foutu de la gueule de Bela Lugosi. Le Blob est-il inarrêtable ? Nan, le truc ne supporte pas le froid et l'on va assister à une lutte sans merci contre le Blob grâce à une armée d'extincteurs, une bataille digne des plus belles nuits parisiennes ! Alors bon, on adhère au principe de laisser le plus possible le Blob dans l'ombre, menace sourde, imprévisible, hitchcockienne mais reconnaissons qu'on a du mal ici à s'extirper vraiment de la basique série B. Steve et sa donzelle potiche n'aident pas vraiment à donner du poids et dur relief à cette jeunesse certes aux aguets mais un peu branquignole. Le Blob, quant à lui, se paye une fin assez originale en Alaska : un gros point d'interrogation s’invite sur l’écran ? Que va-t-il advenir de lui ?... Soixante ans plus tard, après le tremblement de terre qui vient d'avoir lieu en ces terres froides, on a peut-être enfin la réponse : the Blob is not dead ! La menace reste là, à l'affut, tapie...

Danger planétaire (The Blob) (1958) de Irvin S. Yeaworth Jr

Partager cet article