Excluez tout ce qui n'est pas du domaine du gore dans ce film, et vous obtiendrez une excellente allégeance au genre, un petit tour fort agréable dans les plaies ouvertes, viscères et autres suintements des personnages. Coralie Fargeat, visiblement friande de giclées sanguinolentes, réalise un hommage énamouré aux films gore, et on apprécie avec elle la surenchère dans le cracra que nous donne à savourer son Revenge. Toutes les scènes de genre pur sont délicieuses : depuis la greffe de boite de bière chauffée au rouge pour cautériser une plaie (...) jusqu'à la fouille d'une vilaine plaie dans un pied pour y récupérer un tesson (....), depuis la lacération des orbites d'un malheureux homme (.....) jusqu'à l'empalement sur un tronc d'arbre (......), il y a de quoi se frotter les mains devant les inventions de la dame, et devant le bel effort qu'elle met à rendre le plus répugnant possible ces scènes d'horreur. Il y a un réel amusement là-dedans, et une saine façon d'attaquer le genre : frontalement et sans réserve, en gros plans saillants et colorés, sans jamais se cacher derrière ses doigts, avec même un certain goût pour l'abstraction dans ce regard fasciné sur les blessures (de la macro-photo considérée comme un des Beaux-Arts). Le film semble entièrement bâti pour ces scènes-là, et c'est vrai que tout amateur de la chose trouvera là de quoi se rassasier. D'autant que Fargeat, malgré la simplicité de son dispositif, malgré sa volonté louable d'aborder le genre par son plus simple appareil, n'est pas dénuée non plus d'une certaine ambition de mise en scène. La séquence finale, par exemple, qui voit la confrontation entre les deux ennemis jurés du film, est filmée en plan-séquence (en tout cas pendant un très long moment), et si le procédé peut paraître un peu facile et inutile, on ne peut que saluer la volonté : ce plan très complexe, qui ne cesse de nous faire changer de point de vue au sein d'un même mouvement, est spectaculaire, et les yeux apprécient.

J'ai fait le tour de ce qu'il y a à dire de positif sur ce film, et c'est déjà pas mal. Notons à rebours que pour tout le reste, Fargeat se montre une tâcheronne laborieuse et paresseuse, traitant tout par-dessus la jambe. Ses acteurs en premier lieu : longtemps qu'on n'avait pas vu des gusses aussi mauvais, aussi mal choisis, aussi poussifs. Il n'y a que trois rôles masculins là-dedans, mais on ne cesse de soupirer devant les tentatives de ces messieurs pour faire peur : entre une scène de manipulation sexuelle aussi dangereuse qu'une partie de pêche à la ligne et les rictus de souffrance d'un sous-comédien, les occasions de pleurer sont nombreuses. Côté féminin, on a droit à la bimbo de base, et là aussi on grince des dents devant ce jeu à l'américaine tout en grimaces et en cabotinage. Fargeat place ces amateurs dans un univers clinquant et impossible : tout le budget a été mis dans la location d'une villa grand crin, et la dame n'a plus aucune place pour tout le reste des décors, un désert filmé platement et de façon complètement illogique (on est complètement perdu la plupart du temps). Quant au scénario, il se voudrait gentiment féministe mais véhicule une imagerie de la femme parfaitement ringarde, qu'on croirait issue des années 80 tant elle sent le culte de la femme objet et la détestation franche teintée d'admiration de tout ce qui est masculin. En gros, Revenge est un gros navet, mais de temps en temps il se coltine avec le gore, et là c'est super.

Revenge de Coralie Fargeat - 2017

Partager cet article