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15 avril 2022

L'Affaire SK1 de Frédéric Tellier - 2014

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Ce Frédéric Tellier est de la race des cinéastes sérieux et efficaces des années 70, des Deray, des Boisset, et il réalise ici une enquête très honnête et droite, qui n'a pour volonté que d'instruire le spectateur sur des faits, rien que des faits. Le film s'intéresse au premier "serial-killer français" (SK1), Guy Georges, qui dans les années 90 donna bien du fil à retordre aux enquêteurs du 36 quai des Orfèvres, en violant et assassinant en toute impunité une dizaine de jeunes femmes. Le bougre a échappé aux mailles du filet pendant des années, puis a fini par être attrapé et jugé, fin de l'histoire. Mais avant ça, sa traque devint une obsession pour le petit groupe de flics à qui son cas fut confié, et en particulier pour Franck Magne (interprété avec sincérité par Raphaël Personnaz), qui en fit une affaire personnelle jusqu'à l'obsession. Le film, construit rigoureusement en deux "époques" (la traque, le jugement) qui s'entrecroisent, met son point d'honneur à relater sans en faire trop cette affaire spectaculaire, pleine de rebondissements et assez effrayante. Acteurs irréprochables, scénario en béton, on n'a pas grand chose à lui reprocher au niveau véracité, et on suit avec passion les méandres de cette enquête minutieuse. Malgré la succession d'échecs et de fausses pistes, malgré les impasses dans lesquelles se retrouvent la plupart du temps nos flics énervés, malgré les années qui passent, malgré les mille travaux bureaucratiques et guère photogéniques auxquels se livrent les policiers, le film ne nous ennuie jamais, trouvant un rythme tenu et envoyant sans arrêt un nouvel événement pour relancer l'intérêt : un nouveau meurtre, une fille kidnappée qui s'échappe, un suspect, une révélation anonyme, un relevé ADN, à chaque fois que notre attention baisse, le gars nous envoie un os à ronger.

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Quand l'enquête piétine vraiment, il va faire un tour en cour d'assises, où on suit avec tout autant d'intérêt le procès de Guy Georges mené par une Nathalie Baye pugnace. C'est la partie politique du film, celle qui relie Tellier aux Costa-Gavras ou Téchiné : l'avocate est confrontée à plusieurs dilemmes, dont l'affirmation de son innocence par un Georges que tout accuse pourtant, comme des questionnements sur la nécessité de défendre un monstre, comme la part d'humanité qui se cache même chez les pires criminels, comme les moyens d'obtenir enfin de l'assassin des aveux complets qui marqueraient enfin le début du deuil pour les familles des victimes. Ce n'est pas nouveau, mais là encore c'est fait avec une dignité et une droiture totales, sans s'exciter, sans poing levé, et ces débats moraux se suivent donc là aussi avec plaisir. Les fameux tournants du procès, qu'on connaît maintenant, sont soigneusement narrés, on les attend même, et on prend beaucoup de plaisir (un plaisir un peu coupable, il est vrai) à cette affaire. On ne peut pas dire que Tellier impressionne par sa mise en scène, au mieux fonctionnelle au pire maladroite (sa façon de vouloir sans cesse filmer les discussions entre flics dans des endroits différents (dont un bateau...), de rajouter des petites intrigues inutiles à la principale, ce côté enfant sage dans le montage) ; mais après tout, ce n'est pas ce qu'on lui demandait, et ç'aurait même été dommage qu'il fasse le malin sur un tel sujet. Le film reste comme un vrai témoignage de ce qui s'est passé, et ça suffit pour le rendre intéressant.

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