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3 novembre 2020

Borat, nouvelle mission filmée (Borat Subsequent Moviefilm) de Jason Woliner - 2020

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Titres complets : Borat, nouvelle mission filmée : Livraison bakchich prodigieux pour régime de l’Amérique au profit autrefois glorieuse nation Kazakhstan (Borat Subsequent Moviefilm : Delivery of Prodigious Bribe to American Regime for Make Benefit Once Glorious Nation of Kazakhstan)... oui, ou Borat 2, ça ira bien. Voici donc le retour tonitruant du troll du Kazakhstan, qui réapparaît aux moments essentiels (aux élections américaines) pour faire le point sur l'état des moeurs aux States. Après Bush dans l'hilarant premier tome, c'est bien sûr à Trump que le gars s'en prend cette fois-ci, avec toute la fausse ingénuité qu'on lui connaît quand il s'agit d'extirper le pire de la société moderne capitaliste. Le principe est le même : Borat est un envoyé d'un vague pays lointain, arriéré et propagandiste, raciste et sexiste, violent et dictatorial, aux Etats-Unis, censés être le pays plus avancé : ce qu'il en rapporte n'est pourtant guère différent des horreurs de son pays. A grands coups de caméra cachée, il s'infiltre partout, d'un congrès républicain à un séminaire juif, d'une fête des Q-Annons à un repère de complotistes, ramenant avec lui la candeur de sa profonde bêtise et de ses préjugés préhistoriques. Le mauvais goût et la provocation sont de mise, le gars n'hésitant pas à se costumer dans les habits les plus improbables (jusqu'en Trump lui-même) pour mettre à jour l'effarante crétinerie de ses contemporains. Son petit personnage de raciste atavique en ressort beaucoup plus blanc que les gens qu'il filme, amas d'idiots paranoiaques et xénophobes surarmés qu'il prend avec roublardise dans ses filets. Cette fois, il emmène avec lui sa fille, qu'il doit offrir au vice-président Mike Pence en signe d'allégeance. De souillon, la petite va se changer en journaliste américanissime (lors d'une interview tendancieuse, Giuliani va avoir quelques gestes pas nets-nets envers elle).

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Sacha Baron Cohen, dans le rôle, n'a peur de rien : il questionne l'Holocauste, le covid, la folie de la chirurgie esthétique, l'acceptation de la violence, le complotisme, l'inceste, la suprématie blanche et masculine, complètement inconscient dans ses attaques frontales envers les plus vénérables des institutions, se jetant dans la gueule du loup avec un appétit évident. Et souvent il réussit parfaitement à révéler les tares tout en nous faisant marrer, en restant toujours du côté du pire, en incluant son personnage dans les rangs des fachos ordinaires. Son accent rigolo, son innocence et ses manières de sauvage empêchent les gens de vraiment l'agresser, et il peut ainsi laisser libre cours à ses pires instincts : il faut le voir mettre en doute l'Holocauste face à une juive qui l'a vécu, éradiquer le covid avec une poêle à frire ou subir une sentence de mort de la part de son dirigeant par fax interposé. Ses interlocuteurs, assez effarés, laissent apparaître leurs manques de raisonnement ou leurs plus noires pensées, et au bout du compte, si on a bien rigolé, on a eu plus d'une fois l'occasion de tomber dans la déprime face à eux. C'est vrai que, comme souvent dans les suites, Cohen veut absolument surenchérir, faire mieux que le premier volet ; et il se trompe souvent, tombant dans la simple provocation sans but, pas toujours juste, pas toujours fine. Le film enfonce le clou avec lourdeur, et même quelques soupçons sur la véracité de ces caméras cachées viennent ternir le principe : on doute qu'une attaque presque terroriste contre le vice-président se termine simplement par l'éviction de l'impétrant, et on se dit que Borat est devenu beaucoup trop connu pour être encore anonyme (comme le montrent les premières scènes d'ailleurs). Quoi qu'il en soit, la charge, même épaisse, est pertinente. Le rapport aux femmes, notamment, est parfaitement montré (le petit manuel d'éducation de la femme kazakh, une merveille), le regard des puissants sur le tiers-monde aussi, l'imbecillité des pro-Trump tout pareil, et on se dit que Borat, une nouvelle fois, a fait une apparition salutaire... et inutile ?

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