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29 septembre 2012

Gangs of Wasseypur - 1ère partie (गैंग्स ऑफ वासेपुर) de Anurag Kashyap - 2012

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Vrai grand bonheur que ce film improbable venu d'Inde, et qui dresse un somptueux pont entre Les Affranchis et Bollywood. Je ne suis pas très client des couleurs chatoyantes et kitsch des films indiens en général, mais quand elles sont comme ici au service d'une trame aussi solide, d'un scénario aussi hard, elles prennent une dimension inattendue. Ce film, c'est The Godfather à Wasseypur, ville minière envahie par le crime et la mafia dès les années 40 : on suit les aventures d'une famille de gangsters, de génération en génération, à travers une vengeance qui se transmet de père en fils. Attaque de gangs, meurtres en coulisses ou en pleine rue, fusillades échevelées, explosions à l'arrache, coupage de bites en tous genres, tous les éléments du grand film de mafia sont là, jusqu'aux codes familiaux poussés jusqu'à l'excès, jusqu'aux femmes hystériques, jusqu'aux trahisons au sein des familles. Ce n'est que la première partie, elle dure plus de 2h30, et elle est déjà remplie comme un oeuf de moments de bravoure, comme si on avait fait rentrer toute la filmographie de Scorsese, Coppola et Leone en un seul film.

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Il est vrai qu'il faut garder l'oeil ouvert au départ pour suivre les méandres d'une trame aux multiples personnages, d'autant qu'on ne sait jamais lequel va mourir à la prochaine scène, lequel va devenir capital dans l'histoire : c'est l'une des principales qualités, la surprise, la violence qui s'abat brusquement sur un personnage qu'on croyait pourtant central. Une fois qu'on est entré dans le truc, que chaque "clan" est bien défini, le plaisir est le même qu'aux grandes sagas hollywoodiennes : on se fait peur, on rigole devant les excès de comportement des personnages (le principal est un fanfaron à la Pacino, les yeux au rimmel en plus, parfaitement dangereux et grand), on tente sans succès de deviner à l'avance d'où viendra la prochaine félonie, d'où partira la prochaine balle. Depuis l'ouverture du film (sublime séquence d'attaque d'un bâtiment, filmée dans la continuité, à la fois burlesque et effrayante) jusqu'à la dernière (un grandiose meurtre à la Scarface où un gars criblé de balles va mettre 17 minutes à mourir dans un éclat de soleil aveuglant), on reste bouche bée devant la démesure de cette histoire qui brasse 60 ans, 42000 personnages et 300000 évènements.

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Mais ce Anurag Kashyap ne se contente pas de réaliser un très efficace film de mafia. Il y mèle aussi d'autres genres, d'autres inspirations, comme si ça ne suffisait pas. On traverse des tentations sociales à la Zola dans cette description attentive des conditions de vie des prolos indiens sous la mine ou dans leur quotidien ; des envolées vers la saga pure, dans cette façon de brasser des années en un seul mouvement, depuis les attaques artisanales de trains dans les années 40 jusqu'aux batailles de rue sur-armées d'aujourd'hui ; des pointes nombreuses de comédie, dans le ridicule de certaines situations, dans ce goût pour la surenchère du personnage principal (sa façon de menacer son adversaire en pleine rue, avec une voiture-micro et une drag-queen qui danse, très drôle) ; du drame psychologique, dans les portraits féminins surtout, ces histoires d'amour qui sont plus des histoires de possession ; et bien sûr des petits moments de comédie musicale, sans lesquels Bollywood ne serait pas Bollywood. C'est discret, mais bien présent : la musique, curieusement à la fois super ringarde et magnifique, est omniprésente, c'est même presque un des personnages principaux du bazar (à la manière d'un Scorsese, là encore, elle donne vraiment le la, sentimentale et tendue), passant de l'électro à la romance, de la musique traditionnelle au rock 80's.

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Jamais le film, sous ses inspirations américaines, ne renie son identité indienne, et ça c'est très fort. Ca donne certes un film un peu "mondialisé", qui tape dans tous les sens ; ça donne aussi parfois des scènes hallucinantes de kitscherie (les gars qui mangent au ralenti, affreux affreux, ou les scènes de drague, à se taper sur les cuisses tellement c'est ringard). Mais ça donne surtout, au bout du compte, un grand moment "inter-culturelles", où chaque nouvelle tentative stylistiques est une nouvelle occasion de s'extasier devant l'ambition parfaitement controlée de ce film. Ca faisait longtemps que je n'avais pas vu un film de gangsters aussi brillant, violent, drôle et fascinant. Vivement la suite, oui oui oui.

La suite est là.

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