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19 avril 2011

La Beauté du Diable (1950) de René Clair

"Ne m'accable pas, Lucifer, les hommes sont plus cruels que l'Enfer."

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Sacré Michel Simon qui pensait se jouer du jeune, beau et talentueux Gérard Philipe et s'est pris un méchant retour de bâton. C'est peu de dire que le Michel se démène comme un beau diable (après, j'arrête, promis) pour marquer de sa griffe cette version de Faust : roulant des yeux, jouant de sa voix de fausset grinçante puis allant chercher au fond de lui les accents les plus graves et caverneux, gesticulant à l'envi, ricanant comme Jean-Pierre Pernaut après la vision d'un sujet sur la fabrication de sabots, il s'en donne à cœur joie pour rester inoubliable. Gérard Philipe doit se contenter, dans un premier temps, d'imiter le maître - le passage du vieux Faust au Faust jeune - avant de pouvoir voler des ses propres petites ailes, en incarnant une jeunesse fougueuse, enamourée... puis désespérée... Bien aimé au départ, lorsque le jeune Faust se retrouve chassé de partout "n'étant point en règle", l'attitude protectrice et pleine de compassion de Marguerite, femme de cirque et gitane : c'est elle qui va le cacher de la police, prendre sa défense, le traiter humainement, sans même savoir que soixante ans plus tard, elle se retrouverait à sa place (un film politique qui s'ignore, c'est indéniable). Que dire sinon de ce petit classique du cinéma français qui étonne de bout en bout par le côté grandiose de ses décors - tourné à Cinécittà ?!, ah ben oui, rien d'étonnant ; qu'il s'agisse des immenses salles du palais, de l'incroyable atelier d’alchimiste de Faust ou des petites rues de la ville filmées la nuit tombée, il faut bien reconnaître qu'on en prend plein les yeux à ce niveau-là ; cela compense d'une certaine façon les maigres effets spéciaux à chaque fois que Lucifer est convoqué : un jeu de lumière digne d'une discothèque de village et de gros écran de fumée un peu cache-misère qui rappellent, au mieux, une soirée mousse - c'est un peu maigre. On se montrera en revanche plus satisfait par cette séquence au départ (le petit jeu avec les deux Michel Simon) ainsi que par la mise en scène très fluide lors de toute la partie "futuriste" - le destin de Faust - vue dans le miroir... Les jeux sur la lumière et sur les ombres demeurent également assez réussis, notamment à chaque fois que Méphisto exauce un voeu de Faust.

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Le récit est plutôt malin (voilà que cela recommence...) en cela qu'il garde quelques grandes "idées" de la version de Goethe (le scientifique qui sent qu'il est passé à côté de l'essentiel dans sa vie ; l'amour pour Marguerite puis celui pour la princesse ; la possibilité pour Marguerite, jetée en prison, de vendre son âla_beaute_du_diable_16_03_1950_7_gme et le refus de celle-ci) tout en se permettant une très large liberté ; bien aimé en particulier ce long travail de fond de Méphisto avant que Faust consente à vendre son âme (il résiste pendant les deux-tiers du film avant de bêtement céder - le fait de faire "passer la réalité pour un rêve" est également plutôt bien vu). Un autre passage est également assez croustillant (ça sent la guerre froide mes amis, si, si) lorsque Faust présente ses futures inventions au Prince et que Méphisto y va de son petit commentaire caustique pour motiver le souverain : toutes ces différentes avancées scientifiques peuvent avoir une application militaire (et annihiler l'adversaire) et notre Diable, en évoquant cette possibilité, d'être en terrain conquis avec le prince... pendant que Faust, lui, s'emballe au nom du progrès... Gérard Philipe pourrait-il finir par être damné, comment est-ce possible ? Clair joue forcément la carte du happy end mais en proposant un petit bonheur basique et tout mignon : vivre d'amour, d'eau fraîche et de voyages, nos tourtereaux partant dans une petite roulotte sur les routes de France... Hein, oui, bon les temps ont changé, indéniablement, ce ne serait  plus envisageable à notre époque (Vos papiers s'il vous plaît, merci. Docteur Faust ? Ouais c'est ça, fous-toi de moi en plus : c'est moi qui vais t'envoyer en Enfer, mon frère, dans le premier charter...) Clair...

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