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16 février 2007

LIVRE : La Nébuleuse du Crabe d'Eric Chevillard - 1993

nebuleuseAyant été il y a quelques mois pas mal ébloui par Palafox, j'ai sauté avec joie sur cet autre ouvrage du gars Chevillard. Et bien m'en a pris, puisque La Nébuleuse du Crabe est encore une fois un livre de grand malade, où le style poético-burlesque de l'auteur s'affine un peu plus, et où la maîtrise est plus présente.

On peut reprocher à Chevillard d'être trop enfermé dans LA référence, qui est partout présente, dont l'ombre plane sur chaque mot du livre : le grand Henri Michaux. Mais on ne peut que lui reconnaître de l'ambition : c'est quand même plus noble et casse-gueule d'avoir pour modèle Michaux qu'Eric-Emmanuel Schmitt. D'autant plus que Chevillard s'en sort très bien. Certaines pages sont carrément à la hauteur de Plume, c'est dire : c'est la même folie douce, le même sens de l'absurde, la même façon d'étirer chaque idée jusqu'à son point de rupture, aussi bien dans le (non-)sens des idées que dans l'écriture elle-même. Tout comme son maître, Chevillard s'empare d'une image, d'un mot, d'un concept, et les développe jusqu'à la folie, jusqu'à vider de toute logique, de tout repère. Le personnage inventé (Crab) meurt ainsi plusieurs fois (dont une fois mort-né), devient un éléphant ou un ver solitaire, se marie et n'a pas d'enfants (il adore ses enfants absents) mais reste seul, s'érige des statues ou devient l'objet d'une biographie, oublie si l'on marche sur les mains ou sur les pieds, combine tous les mots du dictionnaire (et donc écrit tous les livres du monde), devient un ruisseau (et on pêche un saumon dans sa jambe gauche), se réincarne en mollusque, ou encore a de la colle super-puissante à la place du sang. On le voit, on n'est pas tout à fait chez Zola.

Par la méticulosité de ses constructions de phrases, effarante, géniale, par l'étendue de son vocabulaire, et surtout par son imagination renversante alliée à une logique imparable, Chevillard livre un nouveau livre de Michaux 10 ans après sa mort. La Nébuleuse du Crabe est un long poème absurde et absolument poilant, et s'il tombe parfois dans le simple exercice de style, on s'en fout : c'est un plaisir intellectuel de chaque instant, qui ne se prend pas pour autre chose qu'un livre. Je me comprends.

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