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Shangols
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GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
4 janvier 2024

Courts-Métrages de Wojciech Has - 1947-1952

hqdefaultUlica Brzozowa - 1947
Oïïï Warzawa ! La ville de Varsovie a pris un sacré coup durant la guerre. Has est envoyé en éclaireur optimiste pour filmer les traces d'une renaissance de la capitale polonaise, et s'en sort plus que bien, avec ce court-métrage à cheval entre le film de propagande et le manifeste poétique. Il multiplie les plans d'enfants joueurs, de chatons meugnons et de pitites fleurs épanouies pour montrer qu'au milieu des ruines naît toujours l'espoir du renouveau. Idem pour ces nombreux cadres sur des travailleurs et des ouvriers en activité : on ne lâche rien, et Varsovie jouera les phénix en renaissant de ces cendres. Un jour, les enfants joueront dans les gravats et pourront fièrement lever la tête vers les cieux bleus pour contempler la flèche d'église enfin rénovée. Tonique et motivant, Has nous offre un premier film soigné, monté classiquement mais avec professionnalisme.

harmonyHarmonia - 1948
Magnifique mélodrame à l'italienne. Un gosse tout mignon mais très pauvre et maltraité par un père boiteux et alcoolique rêve de se payer un accordéon, pour pouvoir faire danser les gens. Il va jusqu'à vendre ses bottes et son manteau pour obtenir l'objet rêvé, mais papa rentrant du bistrot verra tout ça d'un autre œil. Tout est bouché dans ce film : le paysage, l'existence du bambin, ses rêves de poésie, l'espoir d'un mieux. Has enferme son petit personnage dans un enfer quotidien, que vient rehausser l'ambiance pluvieuse et grise de cette ruelle polonaise crasseuse. Pas étonnant que les autorités aient interdit ce film : la vision de la vie en Pologne y est affreuse, les enfants, érigés en symboles de l'innocence bafouée, y sont brutalement sacrifiés, les adultes y sont dépeints comme des monstres de vénalité ou de violence. Si vous arrivez à retenir vos larmes sur ce dernier plan où l'enfant ramasse tristement l'accordéon éclaté dans une flaque, vous êtes de marbre. Du très grand mélo.

frSteam Locomotive Pt 47 (Parowóz PT-47) - 1949
Après les soucis politiques de Harmonia, notre brave Has se replie sur le documentaire, plus sage et plus consensuel. Voici donc la glorification du chemin de fer polonais à travers sa dernière innovation, la rutilante locomotive Pt47. Elle est bienvenue, car ce que nous montre le film de l'état du rail jusqu'alors tient du n'importe quoi : ça se bouscule et s'entasse sur de pauvres wagons de fortune. Heureusement, nos ouvriers travaillent dur pour construire l'avenir, et, du dessinateur au fraiseur, du gars qui visse tout ça au fondeur, tous finissent par donner naissance au formidable monstre d'acier qui va s'élancer au son de la musique baroque de circonstance. Édifiant, délicieusement communiste et lyrique.

Moje-miasto-19503Ma Ville (Moje miasto) - 1950
Une évocation toute de nostalgie et de cadres parfaits de la ville natale de Has, Cracovie. Dès les premiers plans, une ville envahie par le brouillard, on sent bien que le bougre tente de capter quelque chose de l'étoffe des souvenirs, quelque chose qui n'a plus grand-chose à voir avec la réalité. Et le défilé de musiciens de rues, de décors nocturnes et lunaires, l'emmêlement des souvenirs, confirmeront la chose : c’est plutôt une tentative sur 6 minutes de rattraper son enfance qu'un documentaire sur la ville que nous offre ici le mélancolique Wojciech. Beau comme un soir d'hiver enneigé.

gdhghPierwszy plon - 1950
Difficile, quand on est un documentariste des pays de l'Est dans les années 40, de ne pas céder aux sirènes du film de moissons. Has, dans la tradition eisensteinienne de l'exercice, magnifie les corps au travail, la solidarité (parfois âpre) des paysans, la vertu du labeur et de l'effort, l'abnégation de ses compatriotes pour venir à bout des durs travaux des champs. C'est comme toujours lumineux et artisanal, mais le bougre parvient à trouver un peu de personnalité dans les derniers plans, portraits de ruraux satisfaits cadrés mathématiquement. Pour le reste, ça sent encore beaucoup le film de propagande soviétique.

Sans titreKarmik Jankowy - 1952
Petit retour à la fiction, pour des besoins éducatifs : Has se trouve en charge d'un projet pour les enfants, et nous offre ce petit conte sur fond rural ensoleillé. Il y est question d'un môme qui construit une cage pour enfermer quelques piafs qu'il estime nocifs. A la faveur d'un cours sur l'utilité des oiseaux, il va découvrir son erreur et avouer son forfait. Bon, l'histoire, pour tout dire, on s'en tape un peu, c'est bien  trop mièvre pour convaincre. Mais au niveau de la mise en scène, c'est un véritable émerveillement : entre la lumière en faisceau de la forêt et les cadres chaleureux en diable de la campagne, l’œil est sans cesse plongé dans la mélancolie de l'enfance déifiée. On dirait du Doisneau rural. A cheval entre documentaire (les plans sur les oiseaux ou les scènes de cours de science-nat à l'école) et fiction, un film lumineux et joliment cucul la praline.

17940-les_fleurs_de_mon_village3Les Fleurs de mon village (Zielarze z Kamiennej Doliny) - 1952
Et un petit cours de botanique, grâce à ce film tout de volonté pédagogique. Pour se payer un appareil de projection, les enfants sages d'une école de montagne récoltent des fleurs des champs afin de confectionner les bonneus tisanes prônées par les médecins. Tout respire l'élévation de l'esprit et l'apprentissage en pleine nature chez ces enfants parfaits, avides d'apprendre les vertus du tilleul ou de la chélidoine comme Shang connaît celles du pastis. C'est un peu trop sucré pour ce coup-là, et on a bien envie qu'un des charmants bambins choppe une diarrhée à force d'ingurgitation de fleurs. Non, ils se paieront une séance de cinéma, comme promis, et regarderont un film sur... les fleurs, c'est une obsession.

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