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4 novembre 2021

The Savage Eye de Ben Maddow, Sidney Meyers et Joseph Strick - 1959

Sans titre

On continue notre voyage en terres documentaires américaines avec ce véritable OVNI qui nous arrive de nulle part. The Savage Eye, à priori, est un documentaire éclaté qui recense des images du Los Angeles des années 50. De ce côté-là, déjà, le film est magnifique : on y voit, soigneusement documenté, dans un beau noir et blanc, avec un côté pris sur le vif irrémédiablement attaché à cette période, le quotidien de ces années-là, et la société de consommation prendre de plus en plus le pas sur la société tout court. L'Amérique est en train de devenir le cauchemar climatisé prédit par Miller, et ces images renseignent puissamment sur la mutation d'une société désormais vouée au fric tous azimuts et dont les sentiments s'estompent peu à peu sous le paraître : au milieu de scènes quotidiennes et ordinaires se glissent des plans spectaculaires, montrant accidents de voiture mortels, matchs de catch hystériques ou procession catholique complètement allumée (le plus beau passage). Avec une soif de "tout" enregistrer de cette métamorphose, Maddow, Meyers et Strick, les trois auteurs de ce film, cavalent dans tous les sens pour ramener un puzzle de plans, qui ne sont d'ailleurs pas sans évoquer Dziga Vertov : il s'agit de montrer au spectateur dans quel enfer il est en train de se précipiter, et de le faire avec un sens impressionnant de la correspondance, du montage, de l'évocation, de l'électro-choc. Koulechov a fait des petits, il suffit de regarder comment ce film cherche la fameuse "troisième image" invisible nichée entre deux plans collés côte à côte.

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Mais s'il s'arrêtait là, le film ne serait qu'un simple documentaire très bien fait. Il est beaucoup plus que ça, puisque notre trio ajoute à ces images du réel une fiction : c'est une femme fraîchement divorcée qui tente de refaire sa vie dans cette ville qu'elle découvre en même temps que nous. Et là, ça devient très grand. Cette trame ajoute une nouvelle couche de sens aux images qu'on voit défiler, et la mélancolie de la belle irradie complètement ces plans, qui prennent du coup une tout autre dimension. La voix-off, qui semble être constitué d'un dialogue intérieur entre la femme et le film lui-même, froid et doux tout à la fois, est la véritable directrice du film, convoquant les images en même temps qu'elle les donne à voir à cette femme, se jouant des temporalités, des tons, des repères géographiques. Le résultat est un véritable tourbillon de sensations qui s'entrechoquent, de strates de réel ou de fiction qui se rencontrent. Tout à tour sentimental, brutal, drôle ou pathétique, The Savage Eye est à la fois un film expérimental, un documentaire et une tentative de "fictionnaliser" la vie réelle. Ne cherchons pas plus loin : c'est génial.

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Commentaires
C
Content de voir partager son enthousiasme pour une oeuvre remarquable. J'attends maintenant avec impatience votre recension Rogosin. Bien à vous.
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