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Shangols
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12 octobre 2021

Tralala d'Arnaud et Jean-Marie Larrieu - 2021

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Dès que vous voyez un film avec Amalric et Lavant qui se passe dans les Pyrénées, vous pouvez être sûrs qu'il est signé Larrieu Brothers. C'est donc une nouvelle fois à une étrange exploration en terres natales que nous convient les deux frangins, en l’occurrence à Lourdes, où se déroule la pathétique aventure de Tralala (Amalric, sa grosse barbe et son banjo marqué de la Sainte-Vierge), chanteur clochardisé tombé sous le charme de Virginie (Galatéa Bellugi), et qui entreprend le voyage vers la ville sainte pour la retrouver. Il se retrouvera plutôt lui-même, puisque sur place Lili (Balasko, dont le talent s'affine avec l'âge) le prend sous son aile et pour son fils (premier zeugma de l'histoire de Shangols, si je ne m'abuse). Plutôt passif, Tralala se laisse faire et devient officiellement Pat, avec frangin (Bertrand Belin), maîtresses (Mélanie Thierry et Maïwenn) et passé de compositeur prometteur à la clé. On assiste donc à la résurrection d'un homme perdu en quelqu'un d'autre, puisque ce changement d'identité va lui être profitable au point de retrouver un certain goût de vivre, un certain talent pour la musique et une certaine fraternité (voire plus si affinités) qui lui manquaient. Avant que notre homme s'en retourne comme il était venu, laissant derrière lui un monde remis plus ou moins sur les rails. Le tout, il faut le préciser, sur la musique de Belin, Dominique A, Cherhal, Katerine ou Daho : le film est une comédie musicale, genre désuet que les Larrieu tentent de remettre au goût du jour par des choix assez radicaux.

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Très covid-friendly (les acteurs portent des masques), le film est à l'image de l'événement : un peu étouffé. Pendant la première heure, assez pénible, on ne cesse d'être gêné par le manque d'énergie du film : les chansons ne se déploient pas, répétitives et pauvres (elles sont de Katerine, adepte de l'épure, mais cette sobriété passe mal ici), chantées par un Amalric guère inspiré dans ce domaine : les Larrieu ont en effet décidé de faire interpréter les chansons par leurs acteurs qu'ils soient à l'aise dans l'exercice ou non. En voulant camper un chanteur paumé, adepte d'un rock'n roll "à l'os", ils ratent leur entrée en matière, et on reste figés sur les gros défauts du film : un rythme neurasthénique qui ne le quittera plus (à l'image de Bertrand Belin, qui joue avec une distance et un flegme totaux), une fantaisie sous tranxène, une manière de louvoyer autour des grandes scènes, un traitement des chansons et des chorégraphies rachitique, bref une façon de jouer au pauvre qui se retrouve jusque dans la photo du film, parfaitement laide. On sait que les brothers aiment prendre tout à contre-pied, aiment surprendre ; mais là, ils tirent la comédie musicale vers un assèchement bien dommageable, ma foi.

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Au bout d'une heure, heureusement, l'émotion commence à poindre, jusqu'à s'installer assez durablement. L'ancrage de plus en plus net dans la ville de Lourdes, où la mystique de bazar correspond bien à l'espèce de magie développée par le film, où la mélancolie s'installe de façon très prégnante, et où on peut rigoler à son aise des bonnes sœurs et des moinillons, y est pour beaucoup, mais également le changement de ton général. Les compositeurs changent, les interprètes aussi, les chansons deviennent plus construites et chiadées, et quelques passages vous scient les pattes comme devrait le faire tout bon "musical" qui se respecte : une chanson magnifique chantée par Mélanie Thierry (que j'épouse sur simple demande par la poste), accompagnée d'une chorégraphie simplissime et très jolie ; une longue séquence dans une vieille boîte de nuit réhabilitée, où toute cette petite faune est dirigée de main de maître pour faire peu à peu grandir l'émotion ; quelques séquences à l'hôtel avec Maïwenn très joliment jouées ; un concert final de Belin qui pour le coup sort de sa torpeur et vous assassine le cœur (les bougres s'avèrent excellents pour filmer la musique live). Quand les Larrieu acceptent de sortir de leur carcan un peu trop étroit, on voit qu'ils savent envoyer du bois, et le film, dans sa simplicité d’exécution, dans sa modestie, dans sa petitesse, sait venir titiller notre corde sensible. La musique de Dominique A par exemple (et le merveilleux morceau La Splendeur), ou les chansonnettes de Jeanne Cherhal, sont utilisées dans tout leur potentiel sentimental, venant rappeler que c'est ça, une chanson : un condensé d'émotions simples. Dommage que les frères aient voulu trop faire les malins avec un cinéma trop étrange pour ce qui est raconté (Lavant, par exemple, est complètement hors du film avec ses grimaces) ; s'ils s'étaient laissés aller, ils auraient pu nous bouleverser, comme ils y arrivent ici ou là.

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Commentaires
J
C'est un tel tue-l'amour ce film, ou tue-la-cinéphilie en tout cas... Le titre, la tronche des acteurs, le nom des réalisateurs... AU SECOURS !
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