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Shangols
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GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
17 juin 2022

Hidden (2020) de Jafar Panahi

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Jafar Panahi avec une bagnole, deux portables et un rideau blanc nous offre un nouveau petit moment de joie entre censure intempestive, poids religieux et familial, superstition tradi et (finalement) petit moment de joie : une actrice invite Jafar et sa fille à une balade en auto. Elle reprend la trame principale de 3 Visages en demandant à Panahi de l'accompagner dans un village pour tenter de convaincre une famille de laisser leur fille chanter pour un spectacle... Visite, discussion, compromis et la voix de l'oiseau parviendra tout de même, maigre consolation mais consolation tout de même, à s'envoler de sa cage. On a notre dose de road trip, notre lot de discussion échevelée (l'actrice a bien préparé son coup), notre louche de village reculé et moyen-âgeux et notre soupçon de grâce : notre petite récompense artistique. Empêchée, cachée, étouffée mais (pari gagné) voix libérée par un Panahi qui croira toujours (fiction ou réalité, qu'importe ici) à la force des images et de l'art contre les éternels empêcheurs de tourner des films en rond. Beauté cachée, beauté volée.   (Shang - 04/05/21)

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On n'a pas vu le film de la même façon, de toute évidence : pour moi, le film représente une tragédie, et la magnifique voix qui se fait entendre à la fin met en évidence la violence profonde faite aux femmes dans les villages reculés de l'Iran. C'est derrière un moche rideau que la jeune fille, qu'on ne verra jamais, entonne son chant douloureux, et c'est tout un drame qui nous est montré là : cette voix, personne n'en profitera, à cause de la tradition, de la religion, de la domination masculine. Si grâce il y a dans cette scène, elle est due à la pureté de la voix ; mais Panahi la filme avec une violence totale, cadrant un rideau (comme il pourrait cadrer un tchador : tout est question de dissimulation) pour mieux exprimer la trivialité de cette pureté dans le monde vérolé de l'intégrisme. C'est poignant de voir ce long plan (que j'aurais personnellement laissé courir jusqu'au bout de la chanson) complètement "empêché", recouvert de ce rideau. La demoiselle ne chantera pas sur scène, ne deviendra pas célèbre, ne s'exprimera pas, et terminera probablement comme la duègne bossue qui garde sévèrement la maison. 

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Face à cette noirceur qui gagne peu à peu le film à mesure que la voiture s'enfonce dans la ruralité profonde, Panahi orchestre une première partie très kiarostamienne, joyeuse et décomplexée. Les deux femmes papotent avec animation, les voiles coraniques glissent légèrement sur les cheveux, les yeux et les bouches sont maquillés, c'est l'Iran urbain et moderne qui s'impose. La différence entre les deux parties est d'autant plus impressionnante. Intéressant, par ailleurs, cette petite confusion de la passagère, qui donne un léger vertige, quant à la véracité de ce qui est raconté dans 3 Visages : elle croit à la vertu du cinéma de Panahi, et quand celui-ci lui rappelle que son film est une fiction, elle semble troublée. Et c'est vrai que c'est sûrement la qualité première des films du bougre que de brouiller les frontières entre fiction et réalité, à mêler le documentaire et le mensonge. Bref, Hidden est une nouvelle fois un petit bijou, triste et gai, léger et profond. Panahi est grand.   (Gols - 17/06/22)

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