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25 février 2021

SERIE : Mum - saison 1 de Stefan Golaszewski - 2016

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On poursuit notre exploration des délicieuses propositions de séries britanniques d'Arte, avec cette sitcom attachante comme tout. A croire que les Anglais quittent enfin la glauque-attitude et décident de regarder autrement les gens depuis quelques temps. En tout cas, avec Detectorists, Mum fait figure de petite révolution : on y découvre que la vie, même minuscule, n'est pas condamnée à l'alcoolisme ou aux pugilats, et qu'on peut aussi la regarder passer avec toute la bienveillance et toute la drôlerie nécessaires. N'allez pas pour autant croire par là que je suis devenu fleur bleue, et que cette série cultive un ton mièvre : au contraire, on se frotte là à l'existence dans sa crudité, avec son lot de solitudes, de manque d'amour, de manque de reconnaissance, de lose... C’est simplement le regard qui est différent : ce Stefan Golaszewski filme ses personnages à hauteur d'homme, sans exclure leurs petitesses et leurs névroses, mais en gardant toujours le sourire empathique de celui qui se sait égal à eux. La tendresse, c'est ça : il y a dans cette minuscule chose des petits trésors de tendresse, maquillés sous l'humour mais bien présents. Et cette tendresse touche beaucoup, parce que les auteurs ont trouvé le ton juste, la bonne distance entre ironie et réalisme, le style idéal pour que puissent se développer ces destins sans tambour ni trompette, et aussi les comédiens parfaits (décidément, les acteurs anglais sont géniaux) pour incarner ces bras-cassés de la vie.

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La série, courte et simple (6 épisodes de 25 mn et c'est plié) se déroule dans un lieu unique, avec une poignée de personnages. Autant dire que le budget explosions a peu été entamé. Autour de Cathy (l'impeccable Lesley Manville), soixantenaire qui vient de perdre son mari, s'agitent des personnages avec tous leurs petits défauts et leurs petites qualités : il y a là le fiston, grand dadais un peu con qui prépare un départ pour l'Australie en rigolant comme un benêt ; il y a le frère, dépressif latent flanqué d'une compagne odieuse qui l'humilie constamment ; il y a la fiancée du fiston, blondinette à deux neurones, dont la spécialité est le pied dans le plat ; il y a Michael (le toujours grand Peter Mullan), l'ami de toujours, celui qui répare les petits trucs cassés, et celui qui secrètement rêve d'un baiser de Cathy, de refaire un bout de vie avec elle, sans parvenir à avouer son amour. Puis il y a d'autres personnages de passage, aussi, notamment la mère de la blonde, véritable furie sexuée qui excelle à enfoncer sa fille, ou l'amie de la même, jeune bécasse complètement illettrée mais très fière d'elle-même. Toute cette bande se croise dans la maison de Cathy, personnage central qui veille sur chacun d'eux avec l'abnégation de celle qui accepte tout le monde. Cette Cathy est un sacré caractère, scruté avec une justesse totale, toute de retenue et de compréhension humaine, et tant pis si au passage tous abusent d'elle ou lui balancent des vannes humiliantes. Voilà, c'est tout. Ça ne raconte que ça. Mais ça suffit pour vous faire chavirer le cœur à plein d'endroits : c'est cet humour irrésistible qui fait beaucoup pour la chose, le sens des situations toutes petites mais justes, ces personnages si bien fouillés (même si, allez, c'est vrai, on frôle parfois la caricature). Il suffit d'une conversation entre Cathy et son amoureux secret, d'une main qui se rapproche d'une autre, d'un sourire, d'une petite blagounette, pour que l'émotion monte doucement dans cette série modeste et sans fric, minutieuse et délicate. La musique de générique ("Cups", un morceau fait à la base avec des gobelets en plastique) est complètement en adéquation avec le ton du film : c'est fait avec trois bouts de ficelle, c'est écrit d'une plume discrète, c'est léger comme un souffle, mais c'est ravageur. On se marre tout autant qu'on est touché par cette galerie de personnages génialement interprétés, et on espère de tout cœur que la série saura se tenir sur cette crête-là, délicate et risquée, dans les saisons suivantes. Je vous tiens au courant.

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