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28 juin 2018

LIVRE : Faire Mouche de Vincent Almendros - 2018

9782707344212,0-4655234Je vais tenter de taper ce texte doucement, de peur que l'écriture fragile comme du cristal d'Almendros ne tremble et que son livre ne tombe en poussière. Le gars envisage effectivement la littérature comme une infinie petite chose à manier avec des pincettes, et considère le non-dit comme la seule façon possible d'écrire un roman. Et de raconter la passionnante histoire qui le hante : le narrateur est invité au mariage d'une cousine dans son minuscule village natal, et entreprend donc ce voyage vers un passé qu'on devine douloureux, accompagné d'une amie remplaçant sa fiancée qui l'a laissé tomber. A son arrivée, il retrouvera un oncle trop discret, une mère trouble et une cousine acariâtre, marchera sur les sentes de son enfance et essuiera d'un doigt mélancolique la poussière sur les meubles de la maison familiale. C'est ineffable. C'est non-dit. L'oncle et la mère ont-ils une relation ? La mère est-elle l'empoisonneuse que soupçonne le village ? pourquoi la cousine en veut-elle à cette femme ? Qu'est devenue la fiancée du narrateur ? On sait pas, tant Almendros prend plaisir à ne pas savoir ce que les personnages ne savent pas non plus, et à nous le faire savoir. On comprend bien ce que cette littérature peut avoir de subtil, de sensible, de presque pas écrit, de diaphane : sur les traces d'un Modiano, Almendros prêche le peu pour en dire beaucoup, et relève ce que l'existence contient de secret, et la part de dissimulation que toute famille porte en elle (sauf mes voisins qui l'exposent crûment dans la rue à grands coups de casserole et de fusils de chasse, mais c'est un autre problème). Oui, la vie est mystérieuse et ne lâche les informations les plus noires que rarement, on est d'accord. Mais le livre, à force de tout retenir, est une suite de scènes inintéressantes qui semblent en dire beaucoup tout en ne disant rien (une cueillette de champignons qui laisse un peu pantois par son absence complète d'événements), et finit par tomber littéralement en poussière entre les doigts. L'écriture blanchissime est là pour nous rappeler qu'il faut se battre dans la vie pour extirper une émotion, ou ne serait-ce qu'un début de fond, au roman chichiteux qu'on est en train de lire. Tout semble rassemblé dans cette dernière phrase qui révèle enfin une vérité qu'on a mis 150 pages à obtenir. On a envie de braquer une lampe sur Almendros pour l'obliger à parler. Ou de relire les auteurs américains, qui font bien moins de manière. Léger, insaisissable, et énervant comme la mouche du titre.

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