Les 47 Ronins (Genroku Chûshingura) (1941) de Kenji Mizoguchi
A l'aune des 3h30 que l'on vient de passer sur le central pour assister à cette oeuvre de "pendant-guerre" de Mizoguchi, on est en droit d'être bien déçu. Etant un fan incontournable de sa fin de carrière (je connais peu le reste, cela dit) je me faisais une joie de découvrir cette histoire qui a la durée d'une véritable fresque; il m'a fallu l'aide d'une moitié de mon sac de bonbons Haribo pour ne pas tourner de l'oeil à mi-parcours, ce qui n'est pas forcément bon signe.
Un grand chauve, Kira fait le mariole à la cour du seigneur; il est subrepticement attaqué par un sauvage, le chef du clan Asanao, qui lui plante son sabre dans le dos - on se dit que, pour être colère à ce point, l'autre a dû lui faire une sacrée vacherie; on se dit qu'on a le temps de toutes façons pour savoir laquelle, on le saura en fait jamais... Le chef Asano est automatiquement condamné à seppuku et son clan dissolu (on sort pas son sabre chez le shogun, pas plus que dans une église) malgré la requête de ses amiraux alors que Kira, qui n'a pas l'air très clair dans l'histoire, s'en sort sans encombre. Sonne l'heure de la vengeance dans le clan Asano, l'ensemble des Ronins (samouraïs destitués) mettant leur destin entre les mains de l'ancien lieutenant du leader, Oishi Kuranosuke. On se dit que ça va pas tarder à péter mais 2 heures 45 plus tard, c'est toujours le statu quo... Faut dire qu'Oishi a fait une requête auprès du Shogun pour réhabiliter le clan Asanao et tant que celle-ci n'a pas été rejetée (sinon c'est aller contre le ciel, ouais) autant aller au bordel pour passer du bon temps - ce qu'il fait, dit-il, pour noyer son chagrin (sa femme se barre, j'aurais fait pareil)... Mais le vent va tourner...
Si vous êtes passionné de plans-séquence de la mort (je vous conseille la fin de la première partie) où on colle la caméra dans un coin le temps d'une petite discussion entre amis de 30 minutes, ce film est pour vous; si en revanche vous êtes fan d'action, d'érotisme ou si tout simplement vous ne savez pas lire (ou n'avez point de bonbons) vous allez vous ennuyer ferme... Ah fusil, on a beau être en temps de guerre, la péloche cela ne devait pas être ce qui coûtait le plus cher, saloupiot de Mizoguchi. Ouais, certes, il prend tout son temps pour nous montrer la grandeur éternelle (...) de l'esprit du Samouraï - volonté, sobriété, obéissance, honneur + 34 notions de base - qui, quand il a accompli sa mission, se doit de respecter jusqu'au bout la loi du Shogun, autrement dit notre ami l'Empereur; bon il faut reconnaître que pour un film de propagande, Mizoguchi y va relativement avec tact (la pensée confucéenne chinoise se prend quand même un taquet au passage, juste pour le plaisir) et si une double lecture en 1941 s'impose forcément, le discours d'obéissance et de sacrifice ne flingue pas non plus tout le film... Mais bon Diou que c'est lent : pour un plan avec une grue, on se tape un nombre de discussions infinies qui finissent franchement parfois par tourner un peu en rond; on a même droit d'ailleurs au même passage deux fois, à la fin de la première partie et après 30 minutes de la seconde, Mizoguchi calant un flash-back entre les deux qui, au niveau de la durée et de l'équilibre, ne devait pas pouvoir tenir dans la première partie... Un peu étrange. Peu de grands morceaux de bravoure, presque aucun personnage féminin, malheureusement, d'autant que sur la fin l'histoire d'amour non avouée et non avouable entre l'un des Ronins et une jeune fille apporte une réelle touche d'émotion. Les 47 Ronins! - douze auraient franchement bien suffi, à mon humble avis.
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