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Shangols
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12 avril 2022

The old Place (1998) de Jean-Luc Godard et Anne-Marie Miéville

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Magnifique exercice de style (ou de "pensée artistique" pour reprendre leur terme) signé JLG et AMM. A partir d'un simple postulat (l'Art est une légende ou une réalité), ils livrent une profonde réflexion où l'on retrouve un concentré de la thématique godardienne. Qu'il s'agisse des atrocités et du refus de tout esthétisme pour les évoquer (rappelons-nous le passage de la caméra-oeil dans Loin du Vietnam), de l'Art du rapprochement qui pourrait définir tout l'Art de Godard lui-même dans ses recherches "documentaires" (à propos de l'utopie, magnifiques plans sur des drapeaux rouges au ralenti, puis sur une peinture et des images d'un champ parsemé de coquelicots, et ce commentaire laconique : "ils ont quitté le paysage ou tout du moins la conscience qu'on a d'un paysage familier..."; ou encore ces chiffres mis bout à bout: 19 personnes ont assisté à la crucifixion, 1400 à la première représentation d'Hamlet, plus de 2 millards à la finale de la coupe du Monde de football..."), ou des rapports entre l'image et le temps et la perception qu'on en a ("L'image d'aujourd'hui n'est pas ce que l'on voit mais ce qu'en dit la légende : c'est la publicité moderne" - souvenons-nous de Lettre à Jane), on assiste à un feu d'artifice d'intelligence avec toujours la petite pointe d'ironie qui fait mouche. Quelques pensées magnifiquement "imagées" ("L'Art n'était pas à l'abri du temps, il était l'abri du temps", ou cette phrase de Bergson : "L'esprit emprunte à la matière les perceptions d'où il tire sa nourriture et les lui rend sous forme de mouvement où il a imprimé sa liberté" illustrée par la photo ci-contre) qui donneraient suffisamment à penser pour (au moins) 3000 heures sur les rapports entre Art, légende et réalité. The old Place, un endroit où se recueille ce bon (vieux) Godard - si je puis me permettre d'être familier.   (Shang - 21/04/08)


 

The Old place 5

Effectivement une des plus belles réussites du Godard-colleur d'images que ce film qui allie l'intellectualisme pur à la sensibilité, et qui nous montre le JLG crépusculaire et romantique qu'on aime tellement dans les années 90. Tout part d'une commande sur la notion d'Art, et c'est assez pour emballer notre couple maudit : c'est parti pour un long moment chaotique, sonore, visuel, pictural, verbal, rempli de jeux de mots et de ponts acrobatiques entre les plans, de considérations sibyllines et de fulgurances, découpé en 23 chapitres qui sont comme autant de petites fenêtres ouvertes. A cette époque, Godard et Miéville sont les maîtres de la correspondance des plans, un tableau du 16ème pouvant répondre à un plan de Griffith, une musique de Mozart pouvant résonner en regard avec un texte de Hugo. Ce qui force le respect, c'est qu'ils parviennent à faire ce genre de "marabout-bout de ficelle" sur toute la durée du film : sur 45 mn, The old Place est parfaitement cohérent, malgré l'éclectisme et le chaos apparent de ce qu'on nous montre. Le but est de tenter, une fois encore, de montrer que l'Art en tant que tel est mort, remplacé par sa marchandisation, par la publicité, par le grand Capital. Il reste quelques bribes de beauté, appartenant la plupart du temps au passé lointain, parfois à des œuvres plus récentes (le cinéma classique comme dernier éden), mais il faut désormais se résoudre à rentrer dans l'ère de la société du spectacle (la dichotomie art / culture de Je vous salue Sarajevo trouve ici une autre illustration). Bon, c'est encore une fois très triste et mélancolique, mais en faisant ressurgir ainsi de la beauté, Godard finit par nous pondre un film qui la célèbre plutôt qu'il ne l'enterre, et finalement on ressort émerveillé de la projection. On a eu envie de tout noter des citations du  bougre (qui sait aussi être drôle à plusieurs endroits), de relever toutes les références de ces œuvres d'art (musique, peinture, littérature, cinéma), et on a désormais envie de croire encore qu'ici ou là la Beauté peut encore exister. En tout cas, tant que JLG nous fera des films comme celui-ci, elle sera reconvoquée avec force.   (Gols - 12/04/22)

God-Art, le culte : clique

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