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23 février 2021

Leningrad Cowboys Go America (1989) de Aki Kaurismäki

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Un bon petit Kaurismäki qui nous fit bien rire en son temps et qui nous fait encore sourire aujourd'hui : un humour, ici, surtout tatiesque, qui se joue dans le détail des coiffures, des costumes, dans les petites mésaventures américaines qui arrivent à ce groupe désargenté mené par ce profiteur de manager (Matti Pellonpää, égal à lui-même), dans ces petites vignettes qui montrent nos hommes tristes comme un mur en ciment tenter de faire contre mauvaise fortune bon coeur... La troupe part aux States pour une tournée... merdique, qui les mène de petit troquet en petit troquet : parfois c'est le four complet (ils parviennent notamment à faire fermer une salle), parfois c'est une reconnaissance inattendue (ils touchent le cœur de bikers en entonnant Born to be wild, c'était pas forcément gagné d'avance). Un road trip musical à la découverte de cette Amérique oubliée, nos musiciens traversant des villes industrielles ou des déserts dans une sorte d'état second, parvenant parfois à se nourrir d'un brocoli ou d'un oignon crus pendant que le manager écluse les bières - ils se rebelleront mais rentreront vite dans le rang avant de parvenir à leur dernière étape : le Mexique où ils sont enfin accueillis chaleureusement...

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Alors oui, c'est un cinéma gaguesque à minima (une banane sur un chien ou sur un bébé, ça fait toujours son petit effet), c'est un cinéma de zonards (featuring Jim Jarmush en vendeur de bagnoles - Aki et Jim, deux cinéastes du peu) où l'on tente de s'adapter aux petites misères de la vie avant de balancer sa chansonnette. On sourit lorsqu'un type en santiags crève un pneu en voulant tester la solidité d'une caisse, on sourit devant ce cercueil qu'on trimballe de place en place et dans lequel se trouve le guitariste congelé, on acquiesce, en souriant doucement d'empathie, devant ce steak que l'on sort du resto dans un doggy bag (forcément) et que l'on donne au chien de la troupe pendant que tous les musicos crèvent la dalle - le sens du sacrifice, pour un musicien, c'est sacré... Le reste n'est qu'une suite de saynètes séparées par des cartons pour nous donner vaguement le lieu ou le moment, des saynètes où l'on voit notre troupe prendre un bain de soleil (leur teint pâle devant rebuter le public) ou s'extasier devant un tracteur (Aki ou le sens du cadre, de la petite mise en scène immobile), où l'on voit nos hommes reprendre vie en enquillant une choppe ou en dansant devant un feu de bois, où l'on voit un membre, parti faire les courses, revenir tout jouasse avec de nouveaux vêtements craignos, où l'on découvre toute la nostalgie que ces musiciens du froid trimballent avec eux lorsque l'un d'eux mâte une photo de leur gonzesse ou de leur tracteur - on apprécie la comparaison. C'est toujours aussi joliment photographié par un Timo Salminen toujours aussi doué pour nous envoyer des cartes postales mouvantes de New-York by night ou d'un bled ricain poussiéreux, et Kaurismäki semble prendre autant de plaisir à faire naviguer sa petite troupe dans ces décors pour le moins originaux dans son cinéma qu'à nous présenter des tronches locales (du black alcoolo au barbier obèse) qui ajoutent immédiatement un petit ton doux-amer à cette mignonne comédie humaine des gens d'en bas. Un trip musical, certes, mais un trip surtout de musicos pince-sans-rire dont seule la musique semble encore capable de traduire la joie qui demeure au fond d'eux-mêmes. Comédie musicalo-minimaliste que le gars Aki était alors capable de tricoter comme de la petite dentelle. Mignonnet.

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