Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Shangols
REALISATEURS
GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
25 novembre 2019

Quelque part sous le Ciel immense (Kono hiroi sora no dokoka ni) (1954) de Masaki Kobayashi

vlcsnap-2019-11-25-21h04m12s889

vlcsnap-2019-11-25-21h06m56s355

Ils sont trop forts ces Japs : tu leur donnes un magasin, une famille et hop ils te trament une romance dramatique enthousiasmante - malgré un climat ambiant et un manque de thunes qui ne portent pas à la fête. Kobayashi, comme Ozu, comme Naruse, comme Kinoshita, réunit une poignée d'acteurs excellents et portraiture cette petite classe moyenne avec une justesse et un brio de tous les instants. Dans la famille Morita il y a : - le fils ainé (Keiji Sada) ; il est, en l'absence du père, celui qui tient le magasin (il vend du saké, définitivement le rêve de ma vie) ; il vient de se marier avec la kinoshitienne Yoshiko Kuga (mais si, vous la connaissez, celle avec le petit grain de beauté narinaire) qui peine un peu à trouver sa place dans la famille. - la mère : ou plutôt belle-mère puisqu'elle s'est greffée au père (disparu depuis donc) après la mort de l’épouse d’icelui ; elle fait la lessive, s'inquiète pour ses (beaux) gosses, est un peu lourde parfois mais demeure gentille comme une mère. - la fille : comme c'est Hideko Takamine, on est déjà séduit ; pourtant elle tient le rôle ingrat de la boiteuse (putain de raid aérien) qui désespère de trouver un jour un mari ; elle jalouse un tantinet tout le monde en attendant de trouver son couvercle. - Le benjamin : étudiant, rêveur, il amène un peu de naïveté et de bienveillance (son empathie pour son pote pauvre ou pour la femme de son frère) au sein de cette famille où l'on sent ici et là les petites tensions. On pourrait ajouter un ancien ami (et amoureux éconduit) de Yoshiko qui vient lui rendre visite ; un prétendant de Hideko qui vit dans la montagne ; une amie d'Hideko qui va se retrouver dans le besoin, etc... Chronique d'un magasin de saké, chronique d'une famille qui se serre plus ou moins les coudes pour faire front, chronique de petites gens avec leurs espoirs, leurs rêves (énoncés dans le titre) et leurs doutes...

vlcsnap-2019-11-25-21h05m40s586

Kobayashi est loin de n'être qu'un petit maître de seconde zone parmi les réalisateurs nippons de son époque ; pour preuve ce film qui repose, au niveau de la trame, sur pas grand-chose et qui se suit comme une aventure virevoltante sur 12 m². On aime ces personnages féminins pleins de petites failles (Yoshiko qui ne veut pas déplaire, Hideko qui aimerait plaire à quelqu'un sans qu'il lui manque trois doigts ou une oreille) qui font preuve d'adversité et finissent par retrouver un éclat de bonheur (Yoshiko auprès de son mari, modèle de compassion ; Hideko auprès de cet amant des montagnes qui la réoxygène) ; on aime ces personnages masculins, un peu soupe au lait - les deux frères qui s'échauffent vite, chacun dans son rôle (le « un peu trop responsable » vs le « un peu trop idéaliste ») -, mais toujours prêts à venir en aide à leur frère humain dans la difficulté. Il y a plein de petites séquences qui, dans le morne quotidien de ce petit magasin, apportent un éclair de joie : une balade en scoot (Keiji et Yoshiko), une balade en montagne (Hideko et son futur compagnon), une balade en lisière de la ville (le benjamin et son pote malingre)... Chacun a ses petites attentes, ses micro-espoirs qui attendent leur heure pour éclore ; lors d'une séquence centrale, Keiji et Yoshiko envoient du haut d'une terrasse des "boules invisibles" en faisant à chaque fois un vœu (pour qu'untel ait de l'argent, qu'untel trouve l'amour...). Non seulement les boules semblent trouver preneur mais elles vont permettre aux deux jeunes mariés de resserrer leur lien, leur complicité ; ils finissent par se retrouver enfin seuls au magasin, libérés de cette promiscuité familiale parfois un peu pesante... même si cette  famille nippone permet aussi, au quotidien, d'apporter du soutien... Kobayashi, sans excès de psychologie à deux balles, sans tragédies, sans déclarations d'amour exacerbées, sans épanchements sentimentaux dégoulinants, livre un portrait très émouvant de cette famille nippone d'après-guerre en mettant bout à bout ces petits riens qui construisent une vie, un destin teinté de moments heureux. Lumineux malgré une atmosphère pour le moins délétère. Très beau film du gars Masaki.

vlcsnap-2019-11-25-21h04m38s731

vlcsnap-2019-11-25-21h05m00s605

 Sommaire nippon

Commentaires
Derniers commentaires