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27 novembre 2015

La Montagne bleue (1ère & 2éme partie) (Aoi sanmyaku & Zoku aoi sanmyaku) (1949) de Tadashi Imai

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Evident plaisir de retrouver Setsuko Hara en prof (je vous l'avais dit qu'elle était immortelle) dans ce film d'après-guerre où la belle incarne contre vents et marées une certaine idée de la modernité. La belle Setsuko (classy et sexy, c'est une geisha elle-même qui le dit) se retrouve au centre d'une controverse et va devoir défendre sa vision face aux petits notables conservateurs du coin. Au début de la polémique (remontons le fil, c'est un peu longuet), il y a une lettre adressée à l'une des élèves de Setsuko donnant, à la jeune fille, un rendez-vous galant. Cette dernière, qui a dû quitter son précédent établissement parce qu'elle "aurait" cherché à fréquenter un garçon, pense que ses camarades, qui l'ont aperçu dans les rues bavardant tranquillement avec un garçon, veulent la piéger. Setsuko intervient alors en classe pour que la coupable se dénonce (elle craque rapidement) et lui fait la leçon : 1) accuser quelqu'un à tort par pure jalousie, c'est mal. 2) marcher simplement avec un garçon n'a rien de scandaleux. 3) prétendre que l'on fait cela au nom de "l'honneur de l'école", c'est aussi idiot que d'imposer aux gens un seul "modèle" "au nom du Japon" (bam, ça c’est fait). Bref, Setsuko demande à ce que l'on arrête d'avoir des œillères et prône une certaine vision féministe (si je peux me permettre) : une jeune fille est libre de se promener avec un garçon et s'il y a affinité et mariage par la suite tant mieux - l'amour n'est pas sale et ce genre de rencontre en amont sera toujours mieux que les traditionnels mariages arrangés sans amour qui finissent en quenouille. Elle choque l'élève qui a écrit la lettre et toutes ses bêtasses de copines : elles vont faire remonter l'histoire aux plus hautes autorités et la belle Setsuko, en avance sur son temps, de se retrouver dans l'œil du cyclone.

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Il y a de bien belles choses dans cette œuvre en deux parties (avec au début de la seconde un résumé d'une dizaine de minutes affreusement longuet... c'est pas le monteur de 24h chrono...). Tout d'abord, of course, la présence et l'aura d'Hara : elle est digne, douce, intelligente, belle, combattive. C'est toute la féminité moderne dans une assiette. Même la très sympathique geisha de l'histoire (elles en pincent toutes les deux pour le jeune docteur de la ville) sent bien qu'elle ne peut pas s'aligner avec ce genre de femme aussi désirable qu'elle et avec de l'éducation. L’intervention en classe de Setsuko au nom d'une certaine "démocratisation", d'une certaine ouverture d'esprit dans les relations hommes-femmes va déclencher un tollé dans ce petit monde d'hypocrites (hommes haut-placés ayant battu des femmes, personnages glauques et violent s'alcoolisant fortement chez les geishas...) bien décidé à faire payer à Setsuko ses prises de position avant-gardistes. La belle sera blessée au cours de ce mesquin processus d'accusation mais trouvera la foi en elle (certains étudiants et le médecin étant également ses premiers supports) pour ne pas craquer et espérer un avenir meilleur : la séquence sirkienne, comme dirait Gols, où elle se tourne vers la fenêtre. La seconde chose particulièrement intéressante dans cette œuvre sont les autres personnages féminins : il y a cette geisha très touchante que j'ai déjà évoquée (très lucide sur son job et très sport face à Setsuko) mais également cette jeune pousse d'étudiante en train de fleurir : Imai nous livre, dans la seconde partie notamment une séquence quasi-bergmanienne (sensuellement monikaesque) lorsque les deux jeunes gens se retrouvent au bord de la mer (chaud, chaud...) et une séquence quasi-truffaldienne avec la course effrénée des deux jeunes amants sur la plage. Rien que pour ces trois personnages féminins, on est contents de nos trois heures.

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C'est vrai, en contrepartie, qu'il y a parfois un petit problème au niveau du rythme : certaines discussions sont un peu longuettes (le "procès" dans la seconde partie est interminable...) et l'on a l'impression qu'au lieu d'avoir tout condensé en deux heures, Imai a joué un peu la montre pour nous livrer ces deux parties de 90 minutes... C'est dommage car il y a beaucoup d'ingrédients positifs et ambitieux dans les discussions de fond, dans la multiplicité des personnages, dans l'humour voire l'audace de certaines séquences (la demande en mariage la plus directe et honnête de l'histoire du cinéma : un moment pur et dur). Mais c'est un petit peu délayé sur la longueur et Imai, à trop vouloir traiter de personnages, se perd parfois un peu en route. L'ensemble reste tout de même fort agréable et donne une image très pertinente des remises en cause "morales" et de l'évolution incontournable de la société dans ce Japon d'après-guerre. Pas un chef d'oeuvre mais une oeuvre clef.  

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