LIVRE : L'Autofictif croque un piment d'Eric Chevillard - 2011-2012
Cette année ne fut point une grande pour le gars Eric Chevillard. Après un roman inégal, cette nouvelle mouture de l'excellent "Autofictif", sauf l'immense admiration que je voue à son auteur pour les siècles des siècles, est franchement décevante. Est-ce le lecteur assidu de la série que je suis qui s'épuise ou Chevillard lui-même qui piétine ? Je ne sais pas, mais cet opus m'a semblé être "celui de trop". Là où Chevillard parvenait en deux lignes à mettre le doigt sur une idée géniale (ou complètement idiote, ce qui était tout autant génial), il lui en faut maintenant 10 pour un résultat moindre. On n'a plus, ou très rarement, ces fulgurances de syntaxe, ces concepts insensés, ces inventions formelles qui laissaient bouche bée. Comprenons-nous bien : il y a encore pas mal de choses amusantes dans L'Autofictif croque un piment, notamment quand il fait parler sa fille Agathe, digne héritière malgré elle de l'imagination débordante de son géniteur, ou quand il s'attaque, éternel sujet chevillardien, aux animaux ; il retrouve quelquefois la rapidité d'exécution de ses grands moments passés : "Voyez l'allumette : elle a un bout qui ne sert à rien". Mais il n'empêche : l'ensemble est trop long, a du mal à retrouver la concision précieuse qui faisait la qualités des aphorismes précédents. Beaucoup d'idées ont même besoin de trois paragraphes (rappelons le principe : l'auteur écrit chaque jour trois aphorismes) pour se développer complètement ; et même, ô comble, les réflexions sur le métier d'écrire ou sur l'inspiration sont parfois assez plates, adjectif qu'on n'aurait jamais cru employable quant il s'agit de parler de l'auteur de Choir. Désolé donc pour cette fois, mais je ne suivrai pas mon idole. Je serais même prêt à lui suggérer que l'autofictif a peut-être fait son temps, et qu'il serait temps de raccrocher les gants. Mais ça m'arrache le coeur.