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15 août 2012

La Scandaleuse de Berlin (A foreign Affair) (1948) de Billy Wilder

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Rarement est-on déçu avec le sieur Wilder. On pense au départ qu’il va s’agir pour lui de nous emmener faire une petite visite dans le Berlin d’après-guerre – ses ruines, ses militaires américains, russes, français traquant la gorette avec leur ration « de survie », ses cabarets louches, ses chanteuses suaves en bas nylon… - tout en tramant une petite amourette entre une Allemande et un Ricain, eh bien que nenni : le Wilder est beaucoup plus finaud et ne va point se contenter du minimum syndical… Une mission du congrès américain est donc envoyée à Berlin pour tenter de juger le « moral des troupes ». A leur tête une certaine Miss Frost (Jean Arthur) aussi rigide que frigide au premier abord, her name speaking by itself. Contrairement à ses collègues mâles qui ont des œillères, elle ne va pas tarder à se rendre compte que le mâle ricain qui fricote avec la fraulein et se paye du champagne avec une poignée de Chesterfield n’a po tellement l’air d’avoir le mal du pays… L’amie Frost a fait la connaissance dès son arrivée (ils sont tous les deux de l’Iowa) d’un certain lieutenant Pringle (John Lund) auquel elle va demander de l’aide : un peu interloquée après la visite d’un bouge fréquenté en masse par les militaires, elle enquête sur une chanteuse aux mœurs « légères » (Marlene Dietrich herself) qui pendant la guerre semblait relativement proche de hautes personnalités dans la Gestapo, voire du Führer, et qui maintenant est apparemment protégée par un haut gradé ricain ; Miss Frost est bien décidée à mettre le grappin sur ce quidam avec l’aide du lieutenant… qui n’est autre que le quidam en question.

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La vraie réussite du scénar tient dans la personnalité de notre trio de tête : on pense au début que l’opportuniste Marlene et le rusé Pringle vont faire bloc pour déjouer la naïve et empotée Frost. Mais ce serait – et le parallèle est malin – comme juger Berlin uniquement vu du ciel ou depuis une voiture (les séquences d’ouverture du film) : derrière les ruines, la vie (festive) continue – pour les militaires tout du moins… - et derrière les apparences de chacun de nos trois individus se cachent des ressources – sentimentales et humaines – insoupçonnables et insoupçonnées : l’amie Marlene est vénale et mange à tous les râteliers, certes ; mais une certaine Miss Frost, plus bonne vivante qu’elle n’en a l’air, sera bien contente d’être à ses côtés pour que la Dietrich – dictée indéniablement par son instinct de survie - la sorte d’un mauvais pas… Le lieutenant Pringle est un charmeur tout terrain mais il n’est pas à l’abri, de devenir le charmeur charmé de l’histoire… La Miss Frost seems to have a broom in the ass but elle a aussi un ptit cœur qui bat – son amourette avec un ennemi politique par le passé – et sa sincérité sentimentale peut finir, contre toute attente, par payer (sous la glace, le feu bout…)… Pour en finir avec ces histoires d’apparence, notons qu’il s’agira dans le final encore d’une histoire de leurres : Pringle se joue de Marlene (qui pense en grande partie se jouer / profiter de lui), pour déjouer un ancien nazi…

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Il y a également dans cette œuvre quelques très belles « petites » idées de mise en scène : la séquence où Pringle et Frost sont attablés dans le cabaret avec la silhouette de Marlene qui s’approche d’eux et apparaît dans une vitre grillagée – c’est elle qui se fera véritablement piéger par le flirt de Pringle avec Miss Frost – censée au départ être la victime ; plus tard, Pringle retrouve Marlene dans sa chambre, lui dit des mots tendres en dénigrant Miss Frost (il est alors en « mission commandée » de reconquête de la Belle pour faire sortir de son trou l’ancien nazi, ex-amoureux de Marlene et jaloux – you follow me ?) ne sachant point que dans la pièce se trouve justement Miss Frost dont le reflet tout flou apparaît dans un miroir… Toutes les « illusions » de la miss (pour reprendre les paroles de la chanson que chantait juste avant Marlene) semblent  fondre… Mais là encore, elle devrait se méfier des apparences… Deux autres scènes se font également joliment écho : tout d’abord, la première fois que Pringle drague Miss Frost pour l’empêcher d’accéder au dossier de Marlene, elle essaie de résister à ce prédateur en tirant entre eux tous les tiroirs dans la salle des fichiers… Elle finira par se faire coincer, après un judicieux travelling, entre deux tiroirs… Sur la fin, c’est elle qui tentera de vampiriser notre bon lieutenant qui essaiera à son tour de dresser entre elle et lui toutes les chaises de la salle… avant de se retrouver dos au mur… La morale, d’une certaine façon, étant sauve. Bien belle construction de personnages dans ce film qui sait prendre son temps, une oeuvre très élégamment mise en scène par l’éternel Wilder.

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