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1 septembre 2009

Jeunes Filles au Port (Minato no nihon musume) (1933) de Hiroshi Shimizu

Décidément plein de ressources, cet Hiroshi Shimizu, avec la découverte de l'un des films de la fin de sa période muette. Formellement, Shimizu est particulièrement au taquet pour donner un vrai sens du rythme à son histoire. Des travellings plus amples - pour accompagner deux personnages en balade, pour faire apparaître de façon surprenante, "en maintenant le suspense", l'un des personnages centraux en fin de plan, pour évoquer la panique d'un individu (le plan aller et retour sur les voitures, d'abord sagement garées puis sur leur départ, gênant la progression de l'héroïne courant après son amoureux) -, des "zooms en cut" - un effet saisissant lors de deux des principales séquences du film, la tentative de meurtre de Sunako et le plan sur sa victime, mourante, plus tard, vers la fin du film -, des fondus enchainés sur des plans fixes avec personnages ou accessoires qui disparaissent, ou encore un montage relativement serré, notamment au départ, avec de multiples intertitres très brefs, enchaînés sur de très courtes saynètes pour nous présenter en un tour de main les personnages et leurs relations : deux jeunes filles, Sunako et Dora, comme "à l'écart du monde", dévouées l'une à l'autre. Le hic : un jeune gars qui s'appelle Henry dont on ne sait s'il voudrait réussir sa vie mais qui en tout cas voudrait être aimé. Il fait son choix, ce qui met forcément un peu d'eau dans le gaz entre les deux étudiantes, en la personne de Sunako. Seulement le Henry, c'est pas non plus le genre fidèle et voilà qu'on le surprend à traîner avec la fille Sheridan, la chtite Yoko. C'est pas vraiment du goût de Sunako qui lui plante une bastos dans le buffet - pas l'air comme ça, la nipponne, mais faut pas non plus trop la pousser!

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Sunako, apparemment guère inquiétée par la police, quitte le port de Yokohama et entame une carrière en tant que "fille aux moeurs légères" - l'ombrelle lui sied, remarquez. Un jeune peintre s'est entiché d'elle mais elle s'ennuie tout de même ferme. Elle décide, le peintre dans ses valises, de retourner dans sa ville natale. Henry, un peu à la dérive, ne tarde point à tomber sur elle dans un bar. Il est encore sous le charme, apparemment, et elle ne l'a pas vraiment oublié non plus. Petite ombre au tableau : Henry est maintenant avec Dora... Il y a une sublime scène au milieu du film lorsque Sunako vient faire une petite visite surprise et "purement amicale" au jeune couple. Une pelote de tricot se balade d'un coin à l'autre de l'écran. Qu'est-ce donc, se dit-on, un chaton qui s'amuse ? On découvre Dora qui suit du regard cette pelote, le fil guidant aux pas de Henry et de Sunako qui viennent, à la coule, d'entamer une petite danse dans le salon. Cette pelote qui plus tard prendra tout son sens - Dora tricote des chaussettes pour son bébé - exprime sublimement à quel point les deux amis sont liés presque malgré eux... Ce n'est point tant de la jalousie que l'on peut lire dans le regard de Dora qu'une certaine acceptation de cette fatalité. Son foyer sera constamment menacé par la présence de Sunako, à moins que cette dernière prenne véritablement conscience de sa position de trouble-fête...

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Shimizu filme ses deux héroïnes au départ, comme des petits points perdus sous un ciel immense, personnages au seuil de leur vie. Peu à peu ces dernières prendront leur destin en main et leurs visages, filmés de plus près, reflèteront leurs émotions : le charme souriant et sûr de soi d'une Sunako qui est "passée de l'autre côté de la barrière", le doute d'une Dora fragilisée qui voit bien que la situation - et surtout le Henry - lui échappe. Muet, sans musique, toujours aussi maîtrisé : parfait pour une grise matinée.

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