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29 décembre 2018

LIVRE : Bonus de Laurent Chalumeau - 2010

9782743623548,0-1354134Les préparatifs des arnaques ont toujours présenté plus d'intérêt pour Laurent Chalumeau que l'acte lui-même, ok. Mais attendre 300 pages pour envoyer la sauce, ça finit par ennuyer un peu, surtout quand le livre en fait 310. Ce roman est à classer parmi les oubliables de son bon auteur, et sent très souvent le faiseur à petits bras, là où, sur une telle tentative, on aurait dû avoir un virtuose du style ou de la construction. La majeure partie de Bonus, donc, consiste à nous faire patienter avant un coup fumeux sensé être l'arnaque du siècle. Ou pour être plus précis, plusieurs coups fumeux : tout tourne autour d'un grand patron mis en examen pour fraude. Autour de son pactole de plusieurs dizaines de millions gravite une bande d'assoifés persuadés d'avoir monté un coup imparable. Une jeune avocate qui s'allie avec un garde du corps pour truquer le dossier d'instruction, un gangster du dimanche qui monte un projet d'enlèvement avec sa soeur complètement con et son beauf prêt à toutes les traîtrises, sans compter un brave type qui envisage de faire exploser un centre de détention pour libérer la sans-papier qu'il aime, et qui va se retrouver embringué dans cette histoire. Le roman entremêle sans grâce ces trois intrigues, accumulant les petits coups de théâtre en attendant le grand, l'Ultime Arnaque qui va confondre tout le monde et révéler un personnage que tout le monde considérait comme secondaire. Chalumeau sait faire, aucun doute, rendre une densité très humaine et en même temps ridicule à chacun de ses personnages. Tous, dans leur misérable et pathétique condition, ont voix au chapitre, depuis la ringarde cagole fan de Céline Dion jusqu'à l'affûté garde du corps, tous ont leur voix et leur caractère. Le roman monte ainsi une équipe qui semble directement pioché dans les strates les plus populaires de notre bonne vieille France profonde, impression prolongée par le désormais célèbre style propre à Chalumeau : le gars manie la langue parlée en vrai maître, inventant un style propre basé sur les raccouris, les approximations, les barbarismes, les formules souvent savoureuses, issues de notre vocabulaire populaire, et s'inscrivant dans une veine piochant autant chez San Antonio que chez les vieux briscards américains. Mais à trop vouloir rendre complexe une histoire qui n'en méritait pas tant, il finit par sentir un peu le faiseur. Il place des cliffhangers faciles à la fin de ses chapitres, livrant une trame beaucoup trop retorse et invraisemblable, et on s'ennuie, à force, devant ces infinis reculs, ces valses hésitations et ces arnaqueurs qui arnaquent les arnaqueurs avant de se faire eux-mêmes arnaquer. La trame stagne, stagne, stagne, et on a mille fois le temps d'imaginer la fin avant qu'elle nous arrive, un poil attendue. Gardons notre respect à Chalumeau, qui a raté son livre ce coup-ci, mais qui en a réussi tant d'autres.

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