Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Shangols
REALISATEURS
GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
20 août 2018

LIVRE : Le Nord du Monde de Nathalie Yot - 2018

lenorddumonde_hdPremier roman singulier écrit par une auteur pas manchotte déjà en poésie : Yot passe la barre de la fiction avec ce roman étrange, entre narration et poésie, entre exercice de style et introspection, et flirte avec quelques barrières interdites, ce qui fait du bien. C'est l'histoire d'une fuite : une femme abandonnée par son homme décide de partir pour se perdre, et prend la direction du Nord, pour ne pas le perdre elle-même, le Nord, et aussi pour butter contre une frontière. La voilà donc partie pour un road-movie autant intérieur que physique, au cours duquel elle va pouvoir faire les comptes de ses envies, de ses sentiments, de ses pulsions, en rencontrant notamment des hommes d'un soir desquels elle n'attend qu'une étreinte, un peu de chaleur, de la compagnie éphémère. Elle va surtout rencontrer un enfant abandonné, qu'elle va alors prendre sous son aile. C'est alors que surgit le thème principal du livre : la maternité. Et c'est aussi là que surgit l'audace principale de la chose : la narratrice envisage ses rapports avec son enfant en termes de passion amoureuse, d'histoire d'amour, le petit venant peu à peu combler ses désirs de féminité et jusqu'à ses pulsions sexuelles. Car, oui, les rapports filiaux en passent aussi par le sexe, et Yot ira jusqu'au bout de sa thématique, avec effronterie, avec l'audace qu'elle a déjà su trouver en poésie (lisez Erotik Mental Food pour vous en assurer). La ballade vénéneuse n'est pourtant jamais glauque : un vrai amour anime cette femme, qui ira jusqu'au bout de son histoire avant de reprendre la route, concluant cette passion comme ses autres passions amoureuses ; car le livre teste le concept de "maternité éphémère", comme si avoir un enfant, c'était avoir une passion, puis la laisser s'éteindre. Les parents qui liront ce livre ne manqueront pas de frémir devant les troublants rapports avec l'enfant, devant cette exclusivité, cette jalousie, dont le personnage fait preuve.

L'histoire est troublante, le style est au diapason. Nathalie Yot écrit syncopé, cherchant des rythmes déséquilibrés, voire des figures de style disparates, faisant alterner des passages scandés, "poétisés", et des paragraphes plus concrets. Toujours tournée vers les corps, l'expérience physique, la chair (thème éternel de la dame), elle parvient à rendre concrètes des pulsions, les émotions passant toujours par un état du corps (la danse, notamment). Parfois, c'est vrai, ça frôle le trop-plein, le trop-écrit, donnant des phrases presque comiques à force d'être brossées et retravaillées ; Yot ne gère pas toujours son lyrisme, et la maladresse rôde. Mais la plupart du temps, ça donne un texte très musical, parfaitement ponctué, qu'on a envie d'entendre plus que de lire. Un texte en tout cas très original, qui reste en tête comme une ballade electro si vous voulez. Prometteur.

Commentaires
Derniers commentaires