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1 octobre 2008

Le Plaisir (1952) de Max Ophüls

Le Plaisir est un bonheur, n'en déplaise à Maupassant pour qui le bonheur n'est pas gai. Max Ophüls fait une fois de plus preuve des plus beaux mouvements de caméra du monde, c'est une caméra qui court, qui vole et on veut bien croire Daniel Gélin lorsqu'il parle des trois jours de préparation pour la scène du saut dans Le Modèle et de tous les techniciens applaudissant le metteur en scène à la fin de la prise. Il y a un nombre de plans fabuleux dans ces trois histoires à tel point qu'on pourrait revoir Le Plaisir en boucle; ajoutez à cela un défilé d'acteurs de haute tenue, des décors et des costumes au taquet, et des dialogues de Maupassant de haute volée... Bref un plaisir intégral.

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Le Masque commence avec une fête somptueuse au Palais de la danse et l'arrivée en fanfare de ce personnage "échappé du musée de cire". 3000 figurants, au moins, qui bougent et s'agitent dans tous les sens, une caméra qui ne cesse de valser d'un côté à l'autre de l'immense salle, gravit des escaliers, la mise en scène est déjà somptueuse avant même qu'on s'intéresse au fil de l'histoire. Ce noceur, qui tente de revivre ses heures de gloire, a un malaise, apparaît complètement défait derrière son masque et on pense qu'il n'arrivera plus jamais à gravir les marches jusqu'à son foyer. Sa femme est une habituée de ses escapades et conte par le menu, au docteur qui l'a accompagnée, l'éternel démon de midi qui habite son mari. Le docteur, parti pour une nuit de folie, en a pour ses frais et repart de l'appart avec une autre vision sur sa propre recherche du plaisir... De la vivacité la plus folle au pathétique du vieil homme, on retrouvera le même schéma - et la même montée d'escaliers - dans la dernière histoire.

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La Maison Tellier est la pièce de résistance et il y a un nombre incalculcable de morceaux de bravoure : la découverte de cette maison "close" se fait quasiment uniquement avec des plans de l'extérieur (la caméra longe les façades avec une aisance qui ferait grimper aux rideaux) et derrière les fenêtres, les stores, on découvre cette vie de menus plaisirs qui tranche avec la noirceur et le brouillard des environs. Et puis un soir, tout ce petit monde de commerçants et de petits bourgeois se casse les dents sur la porte... Ils se retrouvent abattus à errer dans les rues, à répéter trente fois les mêmes phrases creuses avant de se lancer les pires injures avec une violence qui n'a d'égale que leur frustration. C'est à mourir de rire, les petits ridicules de chacun sont dignes de ceux des personnages de Flaubert. En fait Madame Tellier est partie à la campagne, avec toute son armada, pour la communion de sa nièce. Tous les acteurs (Jean Gabin, Pierre Brasseur) et les actrices (Madeleine Renaud, Ginette Leclerc, Danielle Darrieux... que du lourd) s'en donnent à coeur joie dans leur rôle. On sent le plaisir qu'ils prennent à savourer chaque réplique et on se tord de rire devant les réflexions qui fusent. Le panoramique dans l'église lorsque tout le monde se met à pleurer est renversant et la course échevelé de Gabin lorsqu'il tente de saluer une dernière fois Madame Rosa remontée dans son train coupe littéralement les jambes. Le septième art n'a peut-être jamais mieux mérité son appellation.

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Le dernier volet est adapté de la nouvelle Le modèle - au départ il devait s'agir de La Femme de Paul, abandonné en raison d'un changement de producteur en cours de route  - et met en scène les amours mouvementées d'un jeune peintre (Daniel Gélin) avec la volubile et magnifique Simone Simon. Cette dernière, lorsqu'elle se fait "croquer", est dans des tenues à mourir et on se demande comment le Daniel peut finir par s'en lasser - puisqu'on se lasse de tout, pourquoi nous entrelaçons-nous... oui bon juste comme ça, pour le plaisir, puisque c'est le thème... Bref, encore une histoire où la "chute" finale fait son effet, et si le bonheur n'est pas gai, pour boucler la boucle, les films d'Ophüls sont, eux, enivrants. A (re)dévorer et à savourer à pleines dents.   

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