LIVRE : Un gros bobard et autres racontars (En lodret løgn og andre skrøner) de Jørn Riel - 1986

"Elle était comme faite en buvard, tu vois, parce qu'elle épongeait toute l'inquiétude de mon corps rien qu'en me souriant."

Petite cuvée de l'ami Riel, lui qui d'habitude me fait me trémousser de rire à chaque page. En dehors de la dernière nouvelle - Riel aime décidément finir en beauté avec une explosion dantesque (remember Un Curé d'Enfer), trop rares ont été les occasions de vraiment glousser de plaisir. Il demeure toutefois de bien belles idées saugrenues (le joli délire poétique du squelette de Valfred, l'effrayante histoire du ver de Lasselille - et le pugilat qui va avec -, le joli destin de la bouteille de whisky du roi Jensen dans ce pays de ptits buveurs (hum, hum), le détroussage des Joyeux Montagnards Danois (du Riel pur jus : tant qu'il y aura des peau d'ours) ou encore l'incroyable errance du gars Anton tombé dans le "trou gravitique" de cette fameuse côte Nord-Est du Groenland). On sent d'ailleurs parfaitement dans cette nouvelle tout l'attachement de nos héros du froid pour leur terre désertique. Ce qui demeure tout de même hallucinant, c'est de voir que plus les divertissements sont rares (à part picoler entre deux chasses aux buffles musqués, tu peux faire quoi ? Tricoter des gants ?), plus Riel parvient à extraire de ces contrées des historiettes totalement abracadabrantes - mais contées avec un tel art du petit détail qui tue qu'elles prennent automatiquement vie sous nos yeux (je reste persuadé que le récit du squelette de Valfred (qui s'est extrait de son propre corps) est véridique : j'en connais d'ailleurs d'autres dont le squelette s'est déjà fait la malle, abandonnant le bonhomme à son sort et à sa chair : David Pujadas, pour n'en citer qu'un). Petite moisson à mes yeux même si cela reste relatif : on va pas se mettre non plus à critiquer le grand Jørn.