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24 mars 2008

LIVRE : Meurtriers sans Visage (Mördare utan ansikte) de Henning Mankell - 1991

Sans_titreMon libraire attitré a ouvert des grands yeux effarés quand je lui ai annoncé que je ne connaissais pas Mankell, et m'a jeté sur le comptoir ce premier volume de la "saga Wallander" avec un air de ne pas avoir d'air. Bon, j'ai noté ; si jamais un auteur de polar arrive à me tenir sur plus de 100 pages, mon libraire est un grand libraire.

Mon libraire est un libraire honnête. J'ai lu Meurtriers sans Visage jusqu'au bout, avec plus ou moins d'intérêt, je le reconnais. Attention, je ne hurle pas au génie : Mankell ne semble pas avoir dépassé beaucoup plus que la page 3 de "La grammaire pour les CE1", comme ses collègues. Ses phrases sont épouvantablement plates, sujet-verbe-complément, et on a peine pour lui devant la pauvreté de ses tentatives pour en sortir. Sa plus grande trouvaille consiste à aller à la ligne à chaque phrase, il doit penser que ça donne du rythme. Mais l'effet est inutile, le rythme, bien que relativement efficace, ne se trouve pas dans ce tic gênant. Le style, si on peut parler de style, se résume donc à une plate énonciation de faits. Là où Ellroy en a fait l'archétype d'une écriture puissante et heurtée, Mankell en fait un exemple d'écriture jetable. Passons.

Là où le livre tient ses promesses, c'est sur la trame elle-même. Et c'est vrai que quand on lit un polar, c'est pas l'écriture qui intéresse, mais la trame. C'est ici le scénario classique : un meurtre particulièrement horrible au début, et un commissaire qui cherche les coupables. Point barre. La linéarité de l'histoire, qui ne s'embarasse que très peu de trames parallèles, fait merveille : Wallander est entièrement tendu vers la résolution de son énigme, nous avec, et c'est déjà ça de pris. Mankell distille avec subtilité quelques éléments biographiques qui rendent son personnage émouvant : un père sénile, un divorce douloureux, une tendance à vider des bouteilles de whisky avant de prendre le volant (je rappelle que boire ou conduire sont deux verbes du troisième groupe), ça suffit pour épaissir un personnage et lui donner de l'humanité. C'est pas nouveau, on est d'accord, mais justement : Wallander s'inscrit dans la grande tradition du flic littéraire, et Mankell arrive à lui donner tout de même un aspect contemporain, en le chargeant notamment d'un caractère assez réac qui évite toute empathie avec lui. Le personnage est dépassé par cette violence sans motif qui lui fait regretter les bons temps des voyous à casquette et à principes, il est limite condescendant, voire raciste par certains moments (sa fille sort avec un Africain, et ça semble le turlupiner pas mal), et du coup il en ressort avec plein d'aspérité. Bel effort.

Du côté de la trame policière elle-même, c'est du travail de pro, propre et net, sans surprise, réglé en artisan. Fausses pistes, échecs multiples, espoirs soudains, piétinements et indices minuscules, jusqu'à la résolution qui arrive vraiment dans les toutes dernières pages, rien à dire. Je serais presque prêt à lire le suivant. C'est mon libraire qui va être content.

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