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9 mars 2024

LIVRE : L'Araignée (Spindeln) de Lars Kepler – 2022

Irrésistible attirance, chaque année, quand arrive sur mes étals l'élégante couverture noire portant le nom de Lars Kepler, et délice inentamé de découvrir ce qu'elle cache. Lars Kepler, c'est la friandise qu'on s'octroie tous les ans, le petit bonbon légèrement amer qu'on laisse glisser sous la langue, qui s'oublie aussitôt consommé mais qui devient aussi addictif qu'une drogue. Cette nouvelle livraison des noires aventures de Joona Linna et Saga Bauer ressemble à peu près à toutes celles qu'ils ont vécues depuis la naissance de leur duo. Ils font même quasiment ressusciter l'infâme Jurek Walter, un méchant qui avait durablement marqué nos deux héros à l'époque de Lazare et du Marchand de sable. En tout cas la série de meurtres odieux qui s'abattent sur Stockholm semble être commis par lui, ou par un de ses disciples bien décidés à se venger de nos deux flics. La particularité (délicieuse, vous l'avouerez) de ce nouveau serial-killer : il prévient à l'avance de sa prochaine cible et même du lieu où le meurtre va se dérouler en envoyant des petites figurines et des messages codés à la police ; et sa signature consiste à enfermer les pauvres victimes encore vivantes dans des sacs et d'y couler un acide qui les fait fondre... Joona remarque bien vite que toutes les victimes ont un rapport avec lui. Notre flic sans peur sera-t-il plus fort que l'Araignée, parviendra-t-il enfin à sauver une des 9 victimes annoncées, comprendra-t-il le lien qui les unit lui et le meurtrier ? Et Saga, la femme de terrain rompue à toutes les épreuves, s'en tirera-t-elle à nouveau plus ou moins indemne, malgré un étau judiciaire qui se referme peu à peu sur elle, malgré les avanies subies par son corps, malgré les doutes et les remords qui l'assaillent ? Un combat autant physique que psychologique attend nos héros, et on ira très loin (y compris géographiquement) dans le dark.

Pour cette fois, Kepler a choisi de conserver une ligne très claire dans la narration : on ne quitte pas cette enquête, racontée tout droit, sans trop de digressions, sans nous emmener vers des contrées trop lointaines. On apprécie cette épure de l'histoire, qui permet de rester toujours dans ce cauchemar permanent, les victimes de plus en plus intimes de Joona défilant régulièrement, l'Araignée se montrant toujours plus malin que les flics. Cette simplification n'enlève rien à la puissance psychologique des personnages qui, tous, du côté des policiers ou du côté de l'assassin, sont hantés par des sentiments ambivalents, complexes, morbides. C'est ce qu'on aime chez Kepler : rien n'est complètement noir ou blanc, les tueurs même immondes ont des raisons de tuer, les flics même valeureux ont des psychoses enfouies et des tares inavouées. Ce qu'on aime aussi chez eux (rappelons que Kepler est le pseudonyme d'un couple), c'est leur incroyable sens du rythme, qui une fois encore, épate : le montage des chapitres, qui vous empêche littéralement de fermer le livre, le tempo des phrases, la maîtrise totale des moments où on peut relâcher et de ceux où il faut tenir le lecteur, la très agréable balance entre l'action et les notations (très joliment écrites) sur les atmosphère ou les caractères des personnages, tout ça fabrique un roman haletant, addictif, impeccablement construit. On a l'impression de mettre un doigt dans un engrenage à la toute première page, et d'être entraîné jusqu'à la dernière ligne dans la machine. Que cette machine nous fasse traverser un univers noirissime et glauque à souhait n'enlève rien au plaisir, au contraire : l'addiction tient aussi à la monstruosité du tueur, à sa logique déviante et à ces meurtres rituels horribles, qu'on regarde fasciné. Vous l'aurez compris : je suis un très grand fan de Lars Kepler, et ce nouveau livre entretient mon culte. Mon conseil en polar pour toute cette année, jusqu'au prochain Kepler.

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