Si vous cherchez un bon petit bouquin pour partir en bivouac à l'ilôt de Saziley, cet ouvrage de Spire devrait vous ravir. Alors oui, certes, être fan de Gary est forcément un impondérable. Mais qui n'est pas fan de Gary, hein, qui ? Spire nous sert un roman à l'américaine : après avoir épluché toutes les archives des courriers d'ambassade, avoir lu des correspondances inédites avec Camus ou Malraux, s'être tapé toutes les biographies du sieur et des artistes qui l'ont côtoyé à cette époque, s'être plongé dans les livres sur Los Angeles et dans tous les articles écrits par Gary en ces années-là, l'ami Spire tente de nous faire revivre par le menu ces années charnières, entre 1956 et 1960, années pendant lesquelles Gary fut en poste à L.A. comme consul de France. Son travail sur ses bouquins (de la parution des Racines du Ciel à celui de La Promesse de L'Aube, deux livres qui lui amenèrent la consécration), sa vie privée (sa relation pour le moins platonique avec son épouse Lesley Blanch, ses écarts, sa rencontre avec Seberg...), son travail d'intermédiaire avisé entre les Etats-Unis et la France (plus riche qu'on ne le croit), ses relations avec des personnes plus ou moins en vue (des acteurs, des écrivains, des amis de confiance, notamment parmi des personnes qui ont embrassé la "carrière") tout y passe durant ces cinq années où le gars Gary ne chôme pas. Spire, sans esbroufe mais avec une plume alerte, tente de nous faire revivre cette époque et les pensées de cet homme et y parvient avec une belle humilité. Notre écrivain, c'eut été sûrement facile et tentant, ne tombe jamais dans le graveleux (les diverses aventures de Gary sont traitées de loin, seul son coup de foudre sur Seberg est narré un peu plus en détails) et se fait un point d'honneur à rester au plus près de la réalité (on imagine que le travail de recherche fut long, fastidieux mais il porte ses fruits) : Spire apporte un éclairage peu banal sur l'homme, notamment (malgré ses multiples déplacements et son travail d'écriture qui prenaient l'essentiel de son temps) sur cette implication très personnelle dans son taff : Gary sert la France et fait tout son possible pour faire remonter des infos confidentielles, pour travailler avec les journalistes locaux (de presse comme de télé), ou encore pour se mettre au service... d'un certain De Gaulle, rappelé au pouvoir à cette période-là. Spire, plus de soixante ans après les faits, livre une sorte de journal intime du sieur, sans chercher à divaguer, sans élaborer des thèses sorties de nulle part, en s'attachant simplement à rendre hommage à ce personnage souvent imprévisible, indépendant, mais toujours franc du collier. Pas de révélations extraordinaires mais un ouvrage capable de nous plonger avec passion dans l'âme d'un des écrivains les plus originaux et combattifs du XXe siècle (lyrisme). Super lecture et super bivouac, donc, avec des tortues copulant sur la plage entre deux chapitres - nature et culture sont mes deux mamelles...
03 mai 2021
LIVRE : Monsieur Romain Gary de Kerwin Spire - 2021
Commentaires sur LIVRE : Monsieur Romain Gary de Kerwin Spire - 2021
- C'est idiot, hein, ce blog où on ne peut pas se corriger !... J'avais rectifié, of course.
J'ai détesté le film de Fuller, j' étais même sorti de la salle très très en colère à l'époque. Et je n'aimais déjà pas assez Gary pour avoir la curiosité d'aller y voir et comparer. Mais, à la limite, comparer n'est pas ce qui m'importe le plus (Un livre... un film... et toute cette sorte de choses....!)
Son écriture me plaît et m'insupporte. Je l'admire , pourtant elle m'agace. C'est un peu comme Boby Lapointe : J'adore... mais ça devient proprement intenable si on dépasse l'écoute de 2 ou 3 chansons.
Pour revenir à Gary : dans le genre écrivain diplomate juif attaché à sa môman, je préfère de loin Albert Cohen dont l'écriture et la puissance culminent mille pieds au dessus de celles de Gary .
Tiens, c'est drôle, en cherchant hier un bouquin de cinéma au fin fond de mes cent-quatre étagères, j'ai retrouvé le Cahier de l'Herne sur Gary. Complètement oublié que j'avais ça ! Du coup, je l'ai ressorti.
J'y jetterai un oeil, may be.... - Tout à fait d'accord sur Boby Lapointe et sur Albert Cohen
Tiens-nous au courant si Skidoo vaut le coup... j'ai vu le début, Preminger se cite lui-même avec un extrait de son premier vrai mauvais film...
Tu as vu "Des amis comme les miens" et "Rosebud" ? C'est proprement horrible quand un immense metteur en scène essaie de faire moderne et à la page...
Moi celui que je voudrais voir, c'est "Porgy and Bess" mais il y a des problèmes de droits (je crois) - J'ai évité Rosebud avec un soin très méticuleux !!! Et Les Good Friends m'ont toujours (et apparemment heureusement) échappé ! En revanche, j'ai trouvé fascinant The Human Factor (le dernier), très froid, très détaché, très clinique, où Preminger se débarrasse de toutes les tentations hollywoodiennes (tentations que j'aime, par ailleurs). Pour moi, son dernier très grand film reste Bunny Lake, même si je trouve riche et plutôt hardi son Que vienne la nuit, le film juste avant.
Vu Porgy & Bess il y a bien longtemps... M'y suis affreusement ennuyé.
Preminger n'est vraiment pas le pire dans le genre vieux beau qui veut réaliser jeune. A leur décharge, on leur avait ôté tous leurs outils, à ces pauvres bougres, et il fallait bâtir autrement. Tout d'un coup, ils se retrouvaient tout nus.
Les purges cinématographiques de Gary sont là http://shangols.canalblog.com/archives/gary_romain/index.html
Mais vous attaquez le point sensible. Céline, Proust, Gary, le triumvirat. Ehe.
Mais vous attaquez le point sensible. Céline, Proust, Gary, le triumvirat. Ehe.
- C'est vrai, j'en rajoute un peu.
J'ai simplement répondu à la question "Qui n'est pas fan de Gary ?" qui semblait impliquer que la chose était impensable ou impossible. Ce qui est toujours un peu énervant, reconnaissez.
J'aime assez "Adieu Gary Cooper", malgré des minauderies et coquetteries surfaites de la plume. Et aussi La Promesse de l'Aube, sans doute parce qu'il n'y joue pas encore à Gary.
Mais Gros Câlin, Lady L, La Vie devant soi, ne m'ont laissé aucun souvenir. Et j'ai dû en abandonner un ou deux autres en route.
Son écriture est comme lui : elle fait sa cocotte. ça aussi, c'est vite énervant. Ceci dit, je ne déteste pas son humour... de cocotte qui le prend de haut. Mais, pareil, ça finit que ça énerve à la longue.
Une chose est sûre : la place littéraire de Gary n'est absolument pas avec Céline, encore moins avec Proust. Rien, mais alors rien à voir. Je parle en termes d'importance indubitable. Il faudra m'expliquer en quoi, lui, il aura fait avancer le grand schmilblick de la littérature.
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Je préfère, de loin, Gary Cooper.