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24 juin 2020

LIVRE : Santa Muerte (Zero Saints) de Gabino Iglesias - 2015

9782355847769,0-6315982Quelques jets de sang salvateurs après plusieurs livres plutôt sages, c'est toujours bon à prendre. Iglesias débarque avec son imaginaire gore tout à fait délicieux et nous sert un roman noir aussi fulgurant que ramassé : 150 pages d'hémoglobine, de tension et de violence hardcore qui vous laissent assez exsangue à la dernière. Rien que de très classique dans le trame du roman, qui est justement agréable pour ça, pour cette épure complète des personnages et de l'histoire principale. Fernando, petite frappe immigrée aux States de son Mexico natal, est enlevé par un gang de Mexicanos aussi accueillant qu'un Tchétchène dijonnais : il doit céder à ce gang le territoire où son gang à lui deale, sinon... sinon, on lui fera subir le même sort que le brave type torturé devant lui (une boucherie très impressionnante, et c'est là qu'on se rend compte de la primauté de la littérature sur le cinéma : lire les supplices du type est beaucoup plus insupportable que les voir). Notre jeune loubard va donc devoir s'efforcer de convaincre son chef, et comme tout porte à croire que celui-ci va traiter cette demande avec un éclat de rire, il va falloir qu'il s'organise pour assurer sa survie et vaincre ce gang aussi impitoyable que brutal. Sous la houlette de Santa Muerte, la sainte des tueurs, et avec l'aide de quelques tueurs et quelques superstitions locales, notre gars rassemble ses forces pour un combat ultime qui s'annonce charclant.

C'est dans les détails que le livre impressionne : dans cette trame déjà vue, Iglesias, avec son sens du petit truc horrible, avec son goût pour la couleur locale et pour la sociologie autant que pour le polar, parvient à tirer son épingle du jeu en semant dans son texte plein d'éléments très personnels. Ça commence avec une idée géniale : un gars qui se fait couper méthodiquement les doigts, ceux-ci jetés dans un seau, et un bruit de mastication horrible qui s'élève. On ne saura jamais ce qui provoque ce bruit, mais l'imaginer est horrible, et il faut être un sacré pervers pour inventer un truc pareil. Le livre est plein de ce genre de minuscules détails qui le rendent très attachant. Le personnage principal, joliment dessiné dans ses croyances, ses peurs, ses doutes, fait le reste : Iglesias est bon pour toujours le situer dans sa culture mexicaine, et pour rendre crédible le folklore qui l'entoure, fait de superstitions et de foi, de symboles et de prières. On a l'impression de faire un tour dans cette culture, un peu comme dans le film de Winding Refn, Too old to die young, qui partage avec ce livre un certain goût pour la brutalité et la méfiance de la psychologisation. Le texte est super ramassé, peut-être un peu trop (on en redemande !), il file comme l'éclair et tient un rythme d'enfer sans perdre en chemin ses personnages et son écriture acérée. Respects donc : me voilà rassasié en pintes de sang pour quelques jours.

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