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5 octobre 2019

LIVRE : Mona ou Le Mythe de la femme dans l'oeuvre de Henry Miller de Line Toubiana - 2018

9782343159065,0-5598642Toute personne qui s'intéresse de près ou de loin à Henry Miller ne peut qu'avoir ma sympathie. C'est pourquoi je fermerai les yeux sur l'écriture absolument impossible de ce petit essai, et ne relèverai que les qualités certaines de cette Line Toubiana. La dame s'intéresse au mythe des mythes de l'oeuvre de Miller, cette fameuse Mona (June Smith dans la vraie vie) qui a non seulement constitué la base de nombre de chefs-d'oeuvre (La Crucifixion en Rose, les Tropiques), mais a aussi définitivement planté la conception de la Femme Totale dans son cerveau et dans sa vie. On ne possède que très peu de choses sur June, femme secrète et qui alimentait le secret ; quà cela ne tienne : Toubiana va s'accrocher à cette image qu'en donne HM dans ses oeuvres, tout en reconnaissant qu'elle est purement subjective, voire mensongère (on connaît les rapports de Miller avec la vérité). En tout cas, elle parvient à donner une image en coupe très pertinente de la psyché millerienne. Soigneusement rangé de façon très scolaire mais aussi lumineuse en thèse/antithèse/synthèse, son exposé est clair et précis, parfois intéressant pour peu qu'on s'intéresse à la psychologie. La Femme ayant toujours été LE thème de prédilection du bougre, il est forcément intrigant de voir ainsi dressée sa carte du tendre mentale. Mona est donc l'ambivalence incarnée : d'un côté, la putain sadique, la manipulatrice, la profiteuse, l'hystérique sans pitié ; de l'autre, la muse, l'incarnation de l'érotisme et de la sensualité, le soutien, la beauté, l'excitation. Un véritable paradoxe sur pattes, face auquel Miller a réagi sans aucun contrôle de lui-même, tour à tour chien soumis (les ouaf ouaf qui clôturent Sexus) et sévère critique, tout feu tout flamme devant la bombe à retardement que constituait Mona. Toubiana cite précisément les textes, trouvant toujours la phrase qui va bien, ou le passage parlant ; elle va aussi interroger d'autres textes, piochant allègrement dans les livres des amis de Miller (Anaïs Nin, témoin plus que présent de la relation June-Henry, Alfred Perlès, très critique envers la jeune femme) ou dans d'autres (notamment, largement, Simone de Bauvoir). En ressort le portrait d'une femme aux multiples visages, dont il est difficile de savoir si elle était démon (première partie), ange (deuxième) ou pur fantasme (troisième), mais d'une femme qui a fécondé cet écrivain frustré et lui a permis de se lancer vraiment en littérature. J'avais dit que je fermais les yeux, mais j'y reviens quand même : dommage que Toubiana soit tout entière dans ses notes, qui sont érudites j'en conviens, et qu'elle oublie qu'il eût fallu pour ce sujet une véritable plume. Le livre est écrit avec une pauvreté d'expression qui le handicape, comme une thèse très scolaire, et on aurait aimé, pour traiter de la passion brûlante d'une femme de l'envergure de June et d'un homme du génie de Miller, un style beaucoup flamboyant et personnel. Tant pis : voilà un livre pointu, mais intéressant pour comprendre la psyché érotique du plus érotomane des auteurs.

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