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Shangols
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7 janvier 2017

Into the Inferno (2016) de Werner Herzog

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Voilà un titre qui convient plutôt bien à ce qui vient de se passer aujourd’hui outre-Atlantique. Rien à voir, pourtant, puisque l'ami Herzog (qui nous a décidément gâté cette année) s'intéresse aux volcans, en nous faisant une nouvelle fois voyager au Vanuatu, en Indonésie, en Ethiopie, en Islande et même en Corée du Nord. Vous allez me dire, ouarf, les volcans, les trucs avec de la fumée et de la lave ? J'ai lu tout Haroun Tazieff, je connais... Eh bien, pas forcément. Car outre le fait de proposer un voyage extrêmement plaisant avec des images à couper le souffle, Herzog nous raconte aussi la petite histoire derrière ces volcans... Au Vanuatu, il est ainsi question d'esprits sacrés et de (l’incontournable) John From (voyez le film éponyme si cette personne ne vous dit rien…), en Indonésie, (ah le lac Toba, je me rappelle de ces quelques jours passés en mob... ok, je passe) de cérémonies ancestrales et d'amour entre Dieux, en Ethiopie (où le trip se fait sous haute escorte armée) des restes de nos ancêtres disséminés dans la cendre, en Islande, de mythe fondateur et en Corée du Nord, d'un peuple libertaire et déconnant - non, je plaisante, on retrouve nos pauvres Coréens venant faire des pèlerinages entre potes sur le site des volcans (lieu historique s'il en est, sur le plan mythique ou politique), des Coréens si patriotes qu'ils font peur...

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Herzog, accompagné d'un vulcanologue de Cambridge, Clive Oppenheimer, qu'il avait rencontré lors du tournage de Rencontre au Bout du Monde (il y a d'ailleurs dans la foulée une autre petite parenthèse sur un précédent film de Herzog, La Soufrière, comme si les échos dans l'œuvre du cinéaste étaient voulus et programmés) est aussi bien fasciné par les lieux que par ces autochtones qui ont une relation particulière avec ces monstres de magma à la fois imprévisibles et mystérieux (je fais dans la métaphore aujourd’hui). Il ne se contente pas de filmer, notre ami Werner, cette lave en fusion : il s'intéresse aux témoignages de ces locaux qui donnent à ces lieux une autre dimension, une sorte d’aura supplémentaire. On croise également, bien sûr, au passage, des endroits et des personnages des plus surprenants (de ce temple en Indonésie en forme de poulet... à ce spécialiste des ossements humains ultra-extravagant : du nanan pour Werner qui n'a plus qu'à poser sa caméra et observer ce fou furieux dépoussiérer le désert éthiopien en s'extasiant à chaque trouvaille – des petits bouts d'os - comme un gamin).

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Enfin, même si on éprouve un peu de peine à voir ces petits gamins nord-coréens totalement sous l'emprise des adultes (cette petite, notamment, qui joue merveilleusement du piano et qui donne l'impression d'être une simple marionnette quand son prof, pressant sa main sur son dos, l'oblige à saluer) ou ces étudiants en grappe qui récitent par cœur leur chanson sur ce lieu "sacré" que constitue le volcan (autant de postures qui, en cet état totalitaire, ne nous surprennent guère...), on est reconnaissant envers Herzog de saisir pleinement l’opportunité (Cambridge et Pyongyang collaborent depuis des années pour l’étude du volcan) de pénétrer ce territoire peu connu, ce territoire "des extrêmes". Ce tour du monde des volcans est forcément teinté d'un certain exotisme, est ponctué de rencontres peu banales, fortes mais permet également de jouer sur le contraste flagrant entre le "pouvoir de destruction massive" de ces volcans (tout au long de l'Histoire de notre planète) et le côté temporaire et futile des êtres humains avec leurs gentilles petites historiettes et autres croyances. Explosif et passionnant.    (Shang - 09/11/16)

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Oui, c'est intéressant, dirais-je en pinçant les lèvres. En fait, ce qui me gène, c'est que Herzog semble chercher son sujet dans ce film, et du coup réalise plein de courts-métrages qui n'arrivent pas à former une cohésion. On croit qu'il part sur les volcans, et plus particulièrement sur la "magie" qu'ils développent, ce réseau de croyances à la con et de superstitions qu'ils génèrent ; et puis, non, on s'arrête pendant de très longues minutes sur l'origine de l'Homme et sur des fouilles en Ethiopie ; et puis, non, on fait un portrait de la Corée du Nord ; et puis non, etc. Tout ça est bien hésitant, et si chaque film possède ses potentialités, on se dit que Herzog n'a pas réussi à trouver ce qu'il avait envie de dire. Finalement, c'est bien dans le cinéma, dans le sens le plus pur du terme, qu'il semble découvrir, durant quelques minutes, son vrai sujet : la simple contemplation hébétée des motifs abstraits que la Terre dessine avec la lave ou avec ces nuages qui s'élèvent à des kilomètres de haut. C'est quand il ferme son clapet et laisse faire la beauté des images qu'il parvient enfin à exprimer quelque chose de magique : le cinéma, comme art incantatoire, vaut toutes les religions. 

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Alors oui, on comprend bien le message, de la petitesse de l'Homme par rapport à la grande force mouvante de la nature. La musique immonde de choeurs braillards aide bien. Mais loin d'être bêtifiant, Herzog s'intéresse plus aux hommes qu'aux comportements de la nature. Durant les premières minutes, on tremble, le gars veut faire son Jean Roch, mais arrive 50 ans trop tard : la démonstration des danses ancestrales et les considérations folkloriques du grand chef de village sentent l'attrape-touriste à plein nez, et Werner semble prendre ça pour argent comptant. Rouch filmait il y a 50 ans des peuples qui n'avaient jamais vu une caméra ; aujourd'hui on sent qu'on est bien dans la mondialistaion pour pas cher. Heureusement, il délaisse assez vite ce "film du monde" à la con pour s'intéresser aux volcans. Et on préfère qu'il regarde ses contemporains avec ce mélange de respect et d'ironie qui lui va bien au teint : l'église-poulet ou les conneries patriotiques des Coréens, l'enthousiasme béat du type qui fouille le sol ou la naïveté (sincère ?) des types qui croient à un dieu chevillardien nommé John From, sont des sujets parfaitement herzogiens, et on apprécie ces petites pointes d'humour absurde qui montrent l'étendue des passions humaines. Pourtant, il filme tous ces gens avec un profond amour et un réel intérêt. On est loin des volcans, parfois même à des milliers de kilomètres, mais ok, on prend. Werner aime les chiffres mirobolants, et on rigole bien aussi au vulcanologue qui annonce qu'il y a 7000 ans, la Terre a failli disparaître sous une éruption, puis renchérit en annonçant qu'il y a 200 ans, une explosion jamais vue a failli tout bousiller, puis qu'il y a 6000 ans, putain, vous auriez vu ça, sur des kilomètres y avait que de la lave. En fait, Herzog a gardé une âme d'enfant, et adore qu'on lui raconte des histoires de dragons, d'explosions et d'apocalypse. C'est cette foi qui fait tout le sel de ce film maladroit, hétéroclite et fourre-tout. On rêve maintenant que le gars réalise son film sur la Corée ou sur la mondialisation, et transforme ces quelques courts en vrais sujets. Il est le seul à pouvoir les réaliser de cette manière.   (Gols - 07/01/17)

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Vénérez Werner

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