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3 novembre 2006

LIVRE : L'Oeil qui Voyage de Henry Miller - 1928/1939

Sans_titreS'il y a bien un auteur du XXème s. dans lequel je me suis toujours reconnu et dans lequel j'ai su puiser quelque philosophie comme on dit, c'est bien Henry Miller. Ses textes ont changé ma vie, boulerversé ma conception de l'amour et du bonheur, et emmerdé mon collègue bloguesque pendant nos années de fac (la dispute reposant essentiellement sur un combat improbable Henri-Pierre Roché contre Henry Miller). Il m'a même valu un redoublement en section diction au Conservatoire, c'est dire. Mais bon, j'arrête... L'oeil qui Voyage est un recueil de 5 textes épars et pas forcément liés. Ils ont tous en commun le voyage, que ce soit en Angleterre, à New-York ou en Floride, euh, sauf un, "Une Lettre", texte inédit qui justifiât mon achat.

Le premier, "Dérive aux Everglades" est surtout une curiosité : c'est le premier texte publié de Miller ; il souffre encore beaucoup de ses références (le London du Peuple de l'Abîme ou le Orwell de Dans la Dêche); il est pourtant très tonique, et c'est déjà un grand foutoir qui laisse annoncer l'écriture libérée des contraintes qui fera la marque des grands HM. La description des conditions de vie d'un clochard à Miami vaut son pesant de cafards et autres bêtes parasites, c'est déjà drôle et ravageur, grand plaisir.
"De Dieppe à Newhaven" est parfait pour qui veut comprendre la conception qu'a le père Miller de la vie et du monde : il s'agit d'un voyage raté en Angleterre, qui ne se fera jamais à cause de l'esprit tordu d'un douanier anglais. La colère et l'humour jouent en plein, l'ecriture extraordinairement vivante de la chose rend toutes les anecdotes hilarantes. Très joliment retraduite, cette nouvelle est millérienne à mort.
"Une lettre", par contre, laisse un peu perplexe. Essai bâclé sur la peinture, il laisse apparaître un Miller un peu prétentieux (qui critique Van Gogh avec une désinvolture accablante) et pratiquant une écriture peu tenue. Tout de même on y attrappe une autre caractéristique du gars : la liberté d'opinion. Bon.
"La Tarte lumineuse" est une merveille intersidérale, un avant-goût du sublime Cauchemar climatisé. La critique de la société américaine est d'une justesse effroyable, on peut tout à fait la relire aujourd'hui et faire les mêms constats. Encore une fois, l'amertume de Miller n'est jamais aigrie, elle se transforme doucement parfois en texte dantesque, parfois en brulôt à la Dickens. Si vous ne connaissez pas la philosophie de Miller, voilà le texte à lire de toute urgence. Là aussi, la tonicité, la vie qui vibre là-dedans, la puissance de style, laissent pantois.
Enfin, "Le Pont de Brooklyn" présente une autre facette de Miller : le poète "cosmogonique". Partant d'un point central de son existence (le pont cité, donc), il livre une longue digression sur le cosmos et la métaphysique. C'est parfois incompréhensible, comme peut l'être (délicieusement) le Tropique du Capricorne, parfois parfaitement simple... En tout cas, c'est la preuve que HM est un grand poète, ample, habité, puissant. Mélant les hippopotames aux étoiles, la crasse à l'amour, ce texte est sublime.

Commentaires
S
Bon je vois bien que personne à envie de se taper la Pièce de Monnaie du Nouvel An. C'est po payé.
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A
Jolie cette critique, ça donnerait presque envie d'essayer de relire du Miller...<br /> <br /> Ayeuh, pas taper ;-)
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