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6 septembre 2023

LIVRE : Pauvre Folle de Chloé Delaume - 2023

98c0e517e1a1b00df95099a1580f22aebfc749afabfa23bee9b1bd7e0c50b658En tant que mâle non déconstruit, attaché au patriarcat et complice de viol, bref en tant qu'homme du XXIème siècle, je suis très fier de vous annoncer que le livre de Chloé Delaume est raté. Manquerait plus que je défende un roman qui s'en prend ainsi à mon sexe. J'ai un honneur à sauver. Voilà notre auteur, jadis si pertinente dans sa description du statut de la femme dans la société d'aujourd'hui, jadis si drôle et si judicieuse, nous servant un roman qu'elle voudrait chargé de colère contre la gente masculine, responsable de tous ses maux. Depuis l'assassinat de sa mère par son père jusqu'à la trahison amoureuse d'un mâle alpha, la narratrice, malgré qu'elle en ait, fut toujours la proie de ces messieurs. Du coup, elle n'est pas contente, c'est logique. Et elle en veut donc aux hommes, qu’elle met 350 pages à copieusement insulter tant ils sont minables et veules, sauf les homos. Moi, je veux bien étudier la question. Mais dans Pauvre Folle, on tombe très vite sur les limites de la chose : ce n'est pas parce qu'on brandit fièrement tous les motifs de la sororité, ce n'est pas parce qu'on utilise l'écriture inclusive jusqu'à écrire "hétéra" à la place de "hétéro", ce n'est pas parce qu'on souligne grossièrement ses accointances avec les LGBTQSNHTGFR++, ce n'est pas parce qu'on connait si bien les hommes post-MeToo qu'on va jusqu'à en dresser un catalogue exhaustif et moqueur, qu'on est pertinent, qu'on fait avancer le schmilblick de la guerre des sexes, et surtout qu'on arrive à se départir d'un sujet très normé et très bêtement binaire.

Clotilde est donc cette victime éternelle des hommes, qui s'est bien juré de ne plus compter que sur ses amies et de ne plus tâter du sexe. Mais voilà, elle tombe sur un homme qui l'envoûte, grâce au pouvoir éternel des mots : les deux s'échangent des mails magnifiques, construisant un univers virtuel à part, et faisant croire à Clotilde quelle est l’Élue, qu'elle a enfin trouvé chaussure à son pied, et que la rencontre IRL sera magique. Souci pourtant : Guillaume est homo et en couple, et pourrait bien en fin de compte se jouer de la pauvre femme comme tout prédateur masculin qui se respecte. Est-ce à dire que les homos aussi sont des connards ? Pendant un voyage en train, Clotilde fouille son cerveau façon autopsie pour en extirper les souvenirs de sa vie et tenter de faire le point sur son identité sexuelle. Prétexte pour proposer un essai aussi politique que social sur les rapports homme-femme en 2023, sujet épineux s'il en est. Avec son écriture heurtée, difficile à suivre, qui jongle avec la ponctuation sans parvenir à lui faire dire quoi que ce soit, Delaume énerve dès le départ. On suit pourtant les premières pages avec un certain plaisir, content de retrouver la personnalité unique de cette écrivaine, sa drôlerie un peu cynique quand elle parle d'elle, sa lucidité un peu désespérée, un peu moqueuse. Mais très vite, elle tombe dans des travers très dommageables : une écriture crâneuse, de petite maline, voulant à tout prix se ranger parmi les "guérillères", les sorcières, derrière les grands noms de l’activisme féministe le plus trash. C'est peu de dire que ça lui va mal au teint. Tout semble artificiel, insincère, faux, dans ce roman qui cherche absolument à en être, quitte à en rajouter trois louches. Delaume crâne ostensiblement avec ses motifs fatigants de femme en guerre qui a tout compris à la société de guerre des sexes, qui sait mieux que nous en tout cas. En se plaçant ainsi au-dessus de ses lecteurs (les hommes, parce qu'ils sont ridiculisés quelle que soit leur position sur les femmes ; les femmes parce qu'elle sont considérées comme des pauvres victimes un peu concons), elle se montre désagréablement prétentieuse, et produit un livre qui énerve, même si le sujet du féminisme nous intéresse. Pauvre folle ajoute encore de l'huile sur le feu, et on se dit que c'est pas demain la veille qu'on arrivera à enfin discuter sainement entre les sexes. Reste une question : les hétéras font-elles du pédala ?

Commentaires
A
Un sujet qui a fini par me lasser, en temps que victime éternelle du patriarcat ...
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