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28 décembre 2010

LIVRE : Ebauche d'un Autoportrait de Louis Calaferte - 1983

Sans_titreToujours aussi frais et pimpant, le Louis, qui cette fois encore va faire un tour vers les plus glauques des inspirations pour livrer un de ces obus dont il a l'habitude. Maladie, déchéance physique et morale, mort, humiliations, système social impitoyable, enfance brimée et battue, sexe torve, c'est la grande panoplie des malheurs humains condensés en 80 "nouvelles" courtes, qu'on quitte toutes le coeur au bord des lèvres et le dégoût vissé au corps. Calaferte excelle à rendre concrètes la monotonie des jours, la violence des rapports humains, la vanité de toutes nos activités, l'inéluctabilité de la mort et de la vieillesse, construisant ces petits textes avec une minutie d'alchimiste. Toujours avec un humour noir qui fait des étincelles, il fait monter doucement l'horreur au fur et à mesure des paragraphes : on ne voit pas où il veut en venir, et souvent seule la dernière ligne nous dévoile toute la violence de la situation. C'est par exemple un type contraint à se transformer en porte-manteau pour pallier à la misère de son foyer, ou la description précise de la mort du narrateur, ou un procès intenté à toute sa famille : tout y est décrit traquillement, en s'appliquant jusqu'à l'obsession à la beauté du style, puis tout se renverse dans les quelques derniers mots, violents, secs, inattendus. Du suspense finalement, appelons ça comme ça. Les inspirations thématiques, et l'absurdité froide qui s'y développe, font souvent penser à Kafka. Quant à l'écriture, elle est franchement renversante : les phrases sont très longues, tortueuses, pleines d'une ponctuation très précise, nous perdent parfois en route dans la complexité de leur construction ; mais elles retombent toujours sur leurs pattes, après être passées par mille détours. La rythmique, qui peut lasser parfois quand elle devient trop volontairement accrobatique, est impeccablement dosée, et on sent bien qu'on a affaire là à un styliste à l'ancienne, un de ceux qui traitent la langue en orfèvre, en admirateur, en vrai "littéraire". Calaferte est un dinosaure, il considère l'écriture comme un sacerdoce, comme un travail ardu et précis. Ca fait du bien de retrouver une telle exigence, une telle virtuosité ; même si le moral, au sortir de ce bouquin, est à 15 degrès sous zéro.

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