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15 octobre 2010

La Parole donnée (O Pagador de Promessas) (1962) d'Anselmo Duarte

pagador_de_promessas06

Palme d'or à Cannes en 1962 (avec entre autres Romain Gary et François Truffaut dans le jury, cela marque des points au delà de l'anecdote), cet excellent film brésilien n'a pas été sans me faire penser à... Retombées de Sombrero de Richard Brautigan. Certes, cela risque d'en faire tomber plus d'un de sa chaise, nonobstant, même si le point de départ est différent (quel rapport entre un sombrero qui tombe du ciel à -31 degrés et un homme portant une croix (ben heu, le Ciel, nan?)), les conséquences prendront la même ampleur : un simple incident dégénérant en une véritable émeute à laquelle toute la population semble prendre part, presque un conflit international - il est d'ailleurs fait allusion à une éventuelle "troisième guerre mondiale" dans le film de Duarte. Cela dit et assumé, même si hier soir j'étais un peu roploplo devant mon écran, le film de Duarte possède une vitalité, un sens de la mise en scène, une énergie des plus remarquables sans même parler de ce discours assez caustique : tout le monde semble vouloir se greffer sur, pour ne pas dire récupérer, le combat d'un homme uniquement animé par sa (bonne) foi. Une palme que je ne connaissais point qui mérite ô combien le détour.

Bengell

Un simple paysan qui a fait une promesse à Sainte Barbara (gentil petit texte liminaire qui nous explique l'amalgame fait au Brésil entre les croyances païennes et catholiques) se rend, "portant sa croix", de son village jusqu'à l'église dédiée à la sainte. Un périple qui prend toute la longueur du générique d'ouverture qui mérite une certaine dose d'effort et de pugnacité d'autant que la dite croix pèse bien deux tO_Pagador_de_Promessaonnes. Il est accompagné de sa femme et finit par se retrouver en pleine nuit devant cette église fermée. Le gars est déchiqueté mais soulagé, pensant bien avoir fait le plus. Que nenni. Si dès le premier soir, il tombe sur un maquereau foireux qui n'aura de cesse de vouloir lui piquer sa donzelle, il n'en est pas encore au bout de ses surprises. S'expliquant sincèrement, le lendemain, auprès du curé de la paroisse (joli petit suspense, assez craquant au final, pour savoir à la suite de quoi il a fait cette promesse à la Sainte), il se voit refuser l'entrée de l'église par ce même curé qui voit d'un mauvais oeil ce "croyant à moitié païen". Un refus qui ne va pas tarder à faire grand bruit, un journaliste, une congrégation de travailleurs, les hommes de religion, la police,... bref tout le monde se mêlant peu à peu à l'événement... Les escaliers de cette église vont devenir un véritable bordel sans nom alors que notre homme tente simplement d'aller jusqu'au bout de ses convictions. Dévastateur...

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On demeure séduit tout du long par l'extraordinaire rythme que Duarte insuffle à son récit - jamais rat, dès le départ, des changements d'angles pour dynamiser son récit et toujours être au plus près des personnages qui s'expriment -, d'autant que rapidement il n'a plus uniquement deux ou trois personnages à gérer sur son set, mais proprement des centaines... Si la toile de fond est on ne peut plus "couleur locale" - les incontournables séquences de capoeira sur des rythmes musicaux brésiliens qui ont fait leur preuve -, le discours de fond, lui, ne tarde pas à dépasser la simple anecdote du fait divers local : est-il possible pour un homme d'aller jusqu'au bout de ses convictions (cette "parole donnée") face à des institutions établies putassières qui n'ont de cesse de vouloir non seulement surfer sur l'événement mais surtout lui mettre des bâtons dans les roues (oui, bon, la croix n'est pas sur roulettes, on s'entend) ? Du néoréalisme, de la nouvelle vague à la sauce brésilienne ? Il y a sûrement un peu de tout cela dans ce film proprement "miraculeux" - dans la forme - et cynico-tragique - dans le ton. Une bien belle "découverte", avec presque quarante ans de retard...            

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