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7 octobre 2010

L'Aigle des Mers (The Sea Hawk) de Michael Curtiz - 1940

Annex_20__20Flynn__20Errol_20_Sea_20Hawk__20The__07Vous prenez The Adventures of Robin Hood, réalisé par Curtiz deux ans plus tôt, vous changez légèrement les costumes, vous modifiez les toiles de fond, et vous voilà à la tête d'une splendide superproduction à base de corsaires et d'héroïsme épée au poing. Ah c'est sûr que Curtiz ne fait pas beaucoup d'effort pour renouveler son répertoire, et qu'on est là dans les sentiers hyper-tracés du film d'aventures. Ce n'est pas 5 minutes à l'avance qu'on sait ce qui va se passer, c'est 2h02 (le film durant 2h02) : la jeune première qui déteste d'abord le héros avant de tomber raide dingue de lui, le félon ricanant dans un premier temps avant d'être défait par le gentil, l'Angleterre pliant sous le joug de l'armada espagnole avant de relever la tête et de bouter les espingos hors de : c'est du balisage tranquille, qui va jusqu'aux détails (on sait que Flynn, durant son duel, va sectionner d'un coup d'épée cette bougie disposée là négligemment, histoire d'être un peu class, ce qu'il fait consciencieusement 2 secondes plus tard). Nulle suRprise dans le scénario, qui voit d'ailleurs les mêmes acteurs interpréter les mêmes rôles : Claude Rains en salopard (cette fois, il n'y sont pas allés de main morte avec le maquillage noirâtre, pauvre bougre), Flynn en corsaire grande gueule-grand coeur, ses acolytes déjà vus dans tous les autres films d'aventures entre 1920 et 1940, la jeune vierge et son regard mouillant (ah tiens, Brenda Marshall, nettement plus fade qu'Olivia de Havilland).

Annex_20__20Flynn__20Errol_20_Sea_20Hawk__20The__08Et pourtant, ça fonctionne toujours aussi bien. C'est même sans défaut, qu'est-ce que vous voulez que je vous dise. C'est glamour, romantique, enlevé, trépidant, passionnant, et à tous les postes on sent qu'il y a le gusse qu'il faut, celui qui sait faire. Des décors prodigieux (comment font-ils pour rendre aussi crédible un abordage entre deux navires du XVème siècle, alors qu'on voit très bien la toile peinte et le maquillage des acteurs ? C'est de la magie), des dialogues vintage comme on aime ("Tudieu, compagnons, suivez-moi, hissez-moi la drisse et souquez ferme au perroquet du gaillard à tribord, allons botter les fesses à quelques Espagnols, palsambleu !"), des acteurs simplement au service du spectacle (avec une préférence pour l'actrice qui joue la Reine d'Angleterre, Flora Robson, super subtile et qui sait jouer de son physique ingrat avec une jubilation qui force le respect), une musique tonitruante comme ça s'impose, et quelques plans d'anthologie qui font définitivement rentrer The Sea Hawk dans l'histoire : le duel final avec ces ombres de 40 mètres qui se projettent sur le fond du décor, cette évasion silencieuse dans la cale d'une galère, cette scène romantique dans une roseraie mirifique, tout est splendide, rien n'est laissé au hasard.

seahawkQuant à Errol Flynn, le seul acteur (avec Gene Kelly, ok) qui serait capable de me faire virer gay, il est encore une fois énormissime : c'est l'acteur le plus physique qu'on puisse imaginer, et il utilise son corps avec un naturel confondant. Observez la façon dont il s'écroule aux pieds de la reine à la fin du film, après un duel titanesque : en une seule posture, il y a l'épuisement, la bravoure, le respect, et aussi cette façon de se placer tranquillement sur son bon profil pour capter la lumière et faire le joli plan qu'il faut. Pareil quand il s'échappe de la galère : on ne peut que le qualifier de bondissant, et en effet il bondit, du début à la fin, qu'il s'agisse de dévaler un escalier ou de faire une déclaration d'amour. L'énergie faite homme. Bon, brisons là : ce film est un plaisir de chaque instant, un enfant de 3 ans pourrait le comprendre mais c'est tellement délicieux. Curtiz est le plus modeste mais le plus brillant des cinéastes à grand spectacle.

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