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9 mars 2010

Rage (Rabid) de David Cronenberg - 1976

vlcsnap_2010_03_08_22h51m22s138Complètement dans sa veine "triturage de corps" qui va de Stereo à... Eastern Promises (ah ben oui, toute sa carrière, en fait), Cronenberg nous sert ici une glauquissime variation sur la pornographie, la mutation et la pendémie. Le film n'est pas vraiment en place niveau mise en scène, et a pris un méchant coup de vieux. C'est même troublant d'apercevoir, au détour d'un plan, une affiche de Carrie de de Palma dans un coin, ça permet de constater combien le Cronenberg est à la traîne formellement par rapport aux grands films horrifiques de l'époque. Ceci dit, Rabid est quand même impressionnant, et recèle des trésors dans son scénario qui le font définitivement passer dans la catégorie des grands films malsains.

La grande idée, c'est d'avoir choisi comme porteuse de ce virus sexuellement transmissible une actrice issue du porno : Marilyn Chambers arrive avec toutes ses valises (Derrière la Porte verte), et est en charge de porter toute la symbolique sexuelle de l'histoire. Après un accident de moto, la belle est soignée en hôpital vlcsnap_2010_03_08_20h59m19s229de chirurgie esthétique. Les différentes greffes qu'on lui fait subir développent sous son aisselle un orifice que Cronenberg ne se gène pas pour faire apparaître anal ; les pulsions éprouvées par la demoiselle font sortir de cet orifice une véritable bite qui vient perforer ses amants et propager un virus de rage peu avenant. Si Chambers a l'éventail de jeu d'un poulpe, on ne peut toutefois qu'applaudir devant ce choix judicieux : prendre un sex-symbol, la doter d'une teub, et en faire un symbole de déviances physiques. Le côté "diaphane" de l'actrice, qui rompt avec ce qu'on sait d'elle et avec ses scènes très clairement érotiques, fonctionne à merveille pour développer ce mélange d'attirance/répulsion mis en place par Cronenberg. Chaque séquence est ainsi un mix entre l'érotisme troublant des situations (la belle drague dans un cinéma porno, la belle fait du stop, des situations de films de boules, tout simplement) et leurs conclusions glauquissimes (l'appendice humide qui jaillit, le sans qui coule, et la rage qui s'ensuit, bave aux lèvres et hurlements de zombies adéquats).

vlcsnap_2010_03_08_23h12m58s35Même réduit ainsi à un catalogue poussif de scènes attendues, Rabid contient cette part de souffre qui marche toujours dans les films du cinéaste. En plus, la photo est bien cradasse comme il faut, et Cronenberg parvient à surprendre de temps en temps (les derniers plans apocalyptiques, la scène des camionneurs enragés). Entre film de morts-vivants et essai scientifique, Rabid attaque avec une saine frontalité les dérives de la médecine parallèle, le machisme ambiant, les limites d'un féminisme poussé à l'extrême, voire même vient faire un tour vers une thématique romantique étonnamment amenée : la passion, l'amour fou, le sexe comme libérateur de pulsions mortelles. Avec de meilleurs acteurs, une mise en scène un peu mieux pensée, une musique plus écoutable, le film aurait été un brûlot digne de Crash ou d'Existenz par exemple, avec lesquels il partage cette trouble fascination pour les corps mutilés, pour les orifices béants et pour Thanatos couchant avec Eros. Tel quel, il apparaît plus comme un premier brouillon, une esquisse déjà diablement prometteuse. Il n'empêche qu'on en ressort le coeur au bord des lèvres et le cerveau bien touillé.

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