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13 octobre 2008

Assaut (Assault on Precinct 13) de John Carpenter - 1976

pic9Assault on Precinct 13 est si épuré qu'il confine à l'abstraction totale, et malgré tous ses défauts (dont le plus pardonnable est son vieillissement esthétique), il reste assez bluffant par son absence complète d'esbroufe : Carpenter enlève tout le gras pour servir un fulgurant essai aride, archétype du film d'action/western/film d'horreur travaillant les formes en elles-mêmes beaucoup plus que le récit.

Le scénario tient en une ligne : trois personnages déclassés (un black, un condamné à mort, une femme) sont assiégés par une horde de voyous dans un commissariat désaffécté. Ce que veulent les ennemis ? on ne sait pas trop. Ce qu'ils sont ? on s'en tape. Qui va gagner ? peu importe. Des hommes attaquent d'aapst08utres hommes, qui se défendent, point final. A la manière du Hitch de The Birds, Carpenter prive le danger de toute identité, de toute psychologie, ramenant son film à une pure forme vidée de sens : les voyous qui attaquent se résument à de vagues silhouettes s'agitant dans le noir, d'autant plus effrayantes qu'on ne connaît rien d'elles. Ils ne sont représentés que par ces coups de feu qui explosent des vitres, ces êtres privés de sentiments qui tuent des fillettes dans la rue, ces ombres hurlantes qui envahissent le couloir du commissariat. Avant Halloween, Carpenter explore déjà cet anonymat glaçant qui constitue le danger (on se souvient du masque blanc de Michael Myers, reproduit ici sous la forme de personnages lointains et indéfinissables). Le film se contente d'enregistrer des fusillades entre les deux parties, sans vraie violence, comme un jeu sans affect. Il s'amuse même à regarder la beauté du danger, pic6sous la forme de dizaines d'objets qui volent en éclats sous les coups de fusil (longue scène magnifique, sans aucun acteur à l'écran, qui fait juste écouter les sons des silencieux alliés à des feuilles de papier qui volent). Quand la mort arrive réellement, c'est soit hors-cadre (la secrétaire qui se fait buter sans que personne s'en rende compte), soit sèchement, sans spectacle (la mort de la fillette, ou celle du prisonnier évadé représenté simplement par une vitre qui se brise). Bien avant l'omnipotence des médias filmant les révoltes banlieusardes, Carpenter invente cette forme anonyme qui consiste à "montrer sans rien montrer", et c'est troublant de constater comme ses images ressemblent à celles que nous balance CNN de nos jours : le danger est une abstraction, la mort une image.

pic11Certes, il y a déjà des élans politiques dans ce film, ne serait-ce que dans cette idée insolente que ce sont les flics eux-mêmes qui se font attaquer par des voyous plus forts qu'eux. On peut même constater que Assault on Precinct 13 est un peu réactionnaire, un peu de droite même (!), dans cette façon de faire endosser aux seuls voyous des rues la terreur du film (les serail-killers attestés, eux, se mettront du côté de la police), dans cette façon de montrer que quand la police renonce (le commissariat est en déménagement, a déjà à moitié démissionné), alors commencent les problèmes. Mais c'est surtout un film purement formel, sans discours, sans message, sans vraie morale, qui rend hommage aux anciens (le black assiégé renvoie à Night of the Living Dead de Romero, le scénario rappelle les westerns grande école, le personnage féminin est une 1Lauren Bacall moderne) tout en inventant une nouvelle vision, contemporaine et nihiliste. Peut-être un peu ringard dans les détails (l'inventeur des sous-pulls moulants à col roulé doit gémir en enfer), mais furieusement novateur dans son ensemble. 

tout Carpenter is bloody here

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