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Shangols
REALISATEURS
GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
12 mars 2024

La Salle des Profs (Das Lehrerzimmer) (2024) de Ilker Çatak

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Aaaah prof, ce métier si épanouissant qui permet dans un contexte professionnel et social toujours apaisé de faire la joie de nos bambins en développant leur capacité de réflexion sous le regard si respectueux des parents... Oui, il est néfaste de prendre de l'héroïne en se levant mais que voulez-vous... C'est un réalisateur allemand qui se colle cette fois-ci au sujet douloureux du système éducatif classique en s'accrochant aux basques d'une instite (d'origine polonaise - on verra que les multiples petites tensions ethniques ont leur rôle ici) : Frau Nowak se démène tant et plus pour ses élèves (une méthode qu'on pourrait qualifier de pro-active...) et notre réalisateur de la mettre au milieu de son dispositif, de sa mise en scène : filmée plein cadre, derrière son bureau ou en action dans les couloirs, ou, lors d'un contre-champ, en ne laissant apparaître que son épaule et son profil, notre prof est de quasiment tous les plans, s'agitant, agissant, observant, discutant, prenant le taureau par les cornes ou levant les yeux au ciel quand elle est un brin irritée... Faut dire que, suite à la dénonciation de l'une des agentes administratives (elle obtient la preuve à 99% qu'elle vole...), elle va se retrouver au centre d'un maelström de tensions (les tensions raciales exacerbant quelque peu le tout) : elle parvient ainsi à se mettre à dos par effet de domino certains de ses collègues, ses supérieurs hiérarchiques (en partie), les parents d'élèves, puis les élèves eux-mêmes... L'agente accusée, courroucée, et dont l'enfant se trouve dans la classe de l'instite, va tout faire pour ne pas faciliter la situation à notre Frau Nowak chahutée de toute part. Solide, sûre de son fait, continuant coûte que coûte à toujours favoriser les élèves, à leur donner la priorité, elle va devoir lutter pour imposer ses vues...

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Le cinéaste parvient assez intelligemment à montrer comment notre pauvre petite instite (qui n'a certes pas toujours un don en diplomatie - bienvenue chez moi) va se retrouver quelque peu isolée : attaquée de toute part, devant rendre des comptes à chacun (du côté des adultes comme des enfants), elle nous semble un peu trop fébrile au départ pour gérer cette accumulation de problèmes qui lui tombent sur le râble... Elle doit continuellement essuyer les critiques des uns et des autres, subir les décisions éventuelles de sa hiérarchie (le gamin de l'agente, suite à son comportement quelque peu déplacé (...), est renvoyé dix jours - ce qui la met dans une situation encore plus fragile) et continuer de garder la confiance des élèves... On ressent parfaitement tout ce qu'elle doit gérer, se retrouvant au cœur des choses, jugée (pas toujours avec une grande finesse...) par ses pairs, par les parents, par les gamins. Elle pourrait céder, partir, rompre, mais elle essaie de tenir sa ligne de défense, sans jamais chercher à sacrifier sa "mission d'enseignante" - et ce même au plus fort de la tourmente. C'est une assez belle leçon, en soi, que ce petit film dardennien (plus au niveau de la forme d'ailleurs (ces choix de placement de caméra, cette fluidité des plans) que du fond - une "vision" en peu boosté au niveau adrénaline). Même si Çatak, par le biais d'ellipses un peu faciles parfois, évacue certaines difficultés, certaines confrontations trop tendues, comme pour mieux se centraliser sur son personnage principal, même si la fin est un peu expédiée et livre un dénouement un peu "léger", on peut apprécier le traitement audacieux de cette prof têtue butée, véritable petite machine de guerre dans ce contexte si particulier de l'éducation. Vous voulez être prof ? c'est un taff de feignasse, de branleur ? vous y réfléchirez à deux fois. Une démonstration un peu aux forceps mais qui évoque sans détour et pertinence certaines difficultés inhérentes au métier...  (Shang - 17/12/23)

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Moui, pas inintéressant, ce petit film qui, comme chez les Dardenne accumule sur la tête de cette pauvre prof tout ce que la misère humaine (surtout celle de l'Education nationale)  peut avoir de tordu : mal aimée, mal comprise, maladroite, mal reconnue, Nowak, avec sa petite carrure de jeune fille fragile voit tous les cataclysmes lui tomber dessus. Elle tente de faire face, et c'est sa lutte contre l'adversité, son courage et sa ténacité à toujours vouloir être juste qui font le suspense du film. Car La Salle des profs est avant tout un thriller, mais en milieu scolaire : les "autres (parents, élèves, collègues) sont de plus en plus filmés comme des entités hostiles, dangereuses, l'atmosphère devient très malsaine, et on tremble de voir un des mômes sortir un coutelas ou le prof de biolo brandit une machette pour agresser notre pauvre prof dépassée (le film joue sur le contexte actuel avec adresse, repoussants sans arrêt un dénouement qu'on sent irréversible). Cette fin ouverte est d'autant plus intéressante qu'elle refuse de donner des solutions ou de conclure le film : le problème reste irrésolu, l’ambiguïté demeure (oui, on voit le chemisier, mais n'y a-t-il pas d'autres explications possibles à ce vol ?), et de ce point de vue le film est assez pessimiste. Bon, on se dit que Çatak a eu aussi la main un peu lourde et qu'il a voulu traiter trop de sujets en un seul film : racisme, wokisme, réseaux sociaux délétères, nouveaux parents d'élèves trop susceptibles, charge mentale ,... au bout d'un moment, on n'y croit plus trop. Mais malgré tout, on reste intéressé par ce film pas toujours très bien joué (les collègues, brrr), pas toujours très bien écrit mais doté d'un bon timing et d'un sens de l'espace et du cadre très précis.  (Gols - 12/03/24)

 

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