Le Fils prodigue (The Wanderer) de Raoul Walsh - 1925
Est-ce qu'on est d'accord pour reconnaître sans heurter quiconque que la période muette de Raoul Walsh n'est pas sa meilleure ? Si on en croit ce tristounet Fils prodigue, en tout cas, l'adage semble bien se vérifier. Il s'agit d'un récit d'inspiration biblique, faisant rentrer à coups de chausse-pieds la petite histoire (un récit d'initiation et de désillusion amoureuses) dans la Grande (la destruction de Babylone). Jether, un berger un peu cul, rêve d'évasion et de fortune. Il trouvera l'occasion de quitter père, mère, et salopard de frère lors du passage au village de la belle mais vénéneuse Tisha, grande prêtresse d'Ishtar aux yeux tentants mais dangereux. Hop, il s'en va, et trouve dans un premier temps son bonheur dans les ors de Babylone, aux genoux de sa maîtresse. Mais quand celle-ci lui demande d'abjurer sa foi et d'adorer Ishtar, il se rebelle : il veut bien être bonne poire, mais pas parjure. Il fait bien: il y perdra peut-être la considération de sa belle, mais y sauvera sa vie lors du tremblement de terre divin qui rasera la ville.
Bon, il manque un tiers du film, on a du mal à voir par exemple commet Jethel a fait fortune aussi vite. Mais l'heure qui reste permet quand même de vérifier que Walsh n'avait pas vraiment pris le pli de la modernité du cinéma. Malgré les importants moyens déployés, qui sont en grande partie mis dans les décors, les éléphants et le cataclysme final, le film est platement mis en scène, dans des plans qui sentent encore le théâtre et le sous-fifre au service du studio qui l'emploie. Les acteurs sont mauvais, y compris ce brave Tyrone Power Sr qui joue les pères dignes avec moult yeux au ciel et force imprécations célestes. On note tout de même la venue (salutaire) de Wallace Beery qui joue le sagouin (comme d'hab) avec une conviction qui fait du bien. Mais les deux protagonistes principaux (William Collier et Greta Nissen) mélodramatisent à mort pour faire croire que cette historiette cousue de fil blanc est une tragédie invraisemblable. Tout ça est bien moraliste, jusqu'au retour du fils, en haillons, dans le giron familial, avec le message : il ne faut pas aller à la ville, tout y est gabegie et sexe, mieux vaut rester à garder les moutons dans son bête village. Mouais, on peut espérer mieux en terme de discours de motivation. On aime quand même, allez, ces séquences bigger than life de destruction de la ville, et la direction des figurants en autant de petites fourmis fuyant l'avalanche de pierres qui va les occire. Ça sera tout pour ce film-là.
Walsh et gros mythe : ici