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Shangols
REALISATEURS
GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
24 novembre 2021

De Palma de Noah Baumbach et Jake Paltrow - 2015

Sans titre

Toujours intéressant quand deux cinéastes se rencontrent et discutent cinéma, en attestent les brillants livres de Hitchcock par Truffaut ou de Billy Wilder par Cameron Crowe. C'est donc tout réjoui qu'on s'apprête à regarder ce docu consacré au mal-aimé De Palma (malgré ses succès, le gars passe toujours pour un copiste de Hitch et pour un réalisateur trop malin pour être honnête) par le sympathique (selon certains) Noah Baumbach qui, aidé de son confrère, choisit d'entrée de jeu la bonne direction, inspirée de celle de Truffaut : traverser toute l’œuvre dans son intégralité et par ordre chronologique, pour tenter de dégager dans la filmographie bordélique du garçon des lignes directrices, des thèmes, des périodes. Dispositif simplissime : Brian de Palma face caméra qui parle, et des extraits de ses films, avec de temps en temps quelques plans piqués à d'autres, point. Et c'est parti pour un tour exhaustif dans les films du compère, depuis Woton's Wake jusqu'à Passion (manque le funeste Domino, réalisé après). Passionnant de revoir en compagnie du maître les grands films soixante-huitard et Nouvelle Vague des années 60, le tournant "horreur" des années 70, les errances ponctuées de chefs-d'oeuvre des années 80, les blockbusters des années 90, et la fin de carrière plus fluctuante des années 2000. Sans surprise, De Palma adore Phantom of the Paradise et Outrages, Les Incorruptibles et L'Impasse, moins Furie ou Femme fatale, bon. C'est tout de même marrant de le voir d'une telle mauvaise foi, et défendre finalement bec et ongle Le Bûcher des vanités ou l'immonde Mafia Salad ; on retrouve le bougre assez amoureux de sa propre personne (quand un film est naze c'est la faute des autres, du manque de moyens, de la météo ou des producteurs, jamais de lui-même) et ne sachant pas reconnaître les failles de son cinéma. Mais après tout, on est bien d'accord avec lui : ses films, malgré leur éclectisme, se tiennent, et finissent par donner une carrière étonnamment homogène (le pont entre Murder a la Mod et Le Dahlia noir est étonnant, l'analyse de ses différentes utilisations du split-screen depuis Dionysus in '69 jusqu'à Mission impossible pertinente). De temps en temps, le gars se montre presque enthousiaste et rapporte certaines petites anecdotes sur le sale caractère de Sean Penn ou l'incompétence du scénariste Robert Towne qui sont parfaitement rigolotes ; il évoque bien entendu sa liaison avec Nancy Allen, qu'il a magnifiée dans Blow Out (son meilleur film et un de ses plus cuisants échecs commerciaux) ; il balance quelques petits détails techniques ou parle de son goût pour le spectacle, se souvient de ses potes Spielberg ou Scorsese, note ce qu'il doit à la Nouvelle Vague française, bref, tout ça est intéressant.

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Mais, mais mais, nous ne serions pas Shangols si nous ne trouvions pas à redire. Finalement, ce film n'ajoute rien à la gloire du bonhomme, et il ne fait que redire ce qu'il a déjà dit ici ou là au cours des années. Trop admiratifs, Baumbach et Paltrow ne posent pas les bonnes questions, restent en surface du personnage et de son œuvre, pourtant profonds, névrotiques, complexes. Trop court, le film reste une balade, et si le modèle était bien le livre de Truffaut, on peut dire que De Palma ne lui arrive pas à la cheville. Peut-être, c'est vrai, parce que De Palma n'est pas un intello, a du mal à théoriser, s'énerve même quand on parle de concepts, préfère parler chiffres et soucis de production que travelling et construction de scénario. Mais c'est aussi que les deux garçons se sont contentés de peu, et s'arrêtent à l'orée de chaque film pour n'y jeter qu'un petit coup d’œil alors qu'il aurait fallu y plonger avec précision. Du coup : le néophyte en depalmerie se verra un peu paumé devant cette impressionnante liste de films qui partent dans tous les sens, et ne saura guère par où commencer, ni comment envisager le type ; et l'adepte (dont je fais indéniablement partie) se retrouvera gros-jean comme devant devant ce catalogue trop rapide, peu profond et somme toute banal. Il aurait fallu aller à la chasse à l'ours, et ne pas se laisser impressionner par le caractère souvent bourru et secret de Brian de Palma, revoir tous ses films avec précision, traquer les petites thématiques et les grands tics formels, dresser des correspondances entre les films, etc. Quel meilleur modèle que ce mec-là pour se livrer à ce genre d'exercice, lui qui a tout fait, du petit cinéma fauché aux gros machins avec Tom Cruise, des échecs aux succès, du travail avec les studios aux films indépendants (voire familiaux), lui qui a fabriqué une œuvre si formaliste, si visuelle, si personnelle, lui qui a traversé tout un pan du cinéma américain ? On se contentera de ce bref aperçu trop énamouré, et on relira le livre de Blumenfeld consacré au maître pour plus de précision.

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