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13 juillet 2020

La Croisée des Chemins (1976) de Jean-Claude Brisseau

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Premier long-métrage d'un Brisseau déjà en pleine forme : désir, radicalité (des idées), jeunesse, sexe, solitude, désespoir, fantasme, mort. Tout y est, même si le style est encore un peu hésitant, les acteurs au diapason et l'utilisation systématique de la musique un peu gonflante (une ou deux fois le thème du Mépris pourquoi pas : mais à chaque monologue pseudo-lyrique ça gave, ça devient même très lourd, à la limite du surlignage, du manque de confiance en ce qui est écrit et montré). Soit donc deux jeunes filles de 18 ans forcément en plein doute ; l'une semble aspirée par les idées révolutionnaires des jeunes gens qu'elle fréquente, l'autre vivant plus dans son petit monde personnel entre espoir et dépression, rêvant de reconnecter avec le père (qui est aussi celui de son ami : Brisseau himself) qui s'est barré très tôt. Deux jeunes filles qui dorment ensemble, découvrent leur nudité, attirent les premiers garçons et discutaillent de leur vague à l'âme ; une première partie entre jeunes filles mi-figue mi-raisin (ça rigole puérilement, ça tente de parler sérieusement aussi) qui se termine après un premier coup de théâtre - l'influence de Bonnie et Clyde ou de la bande à Bonnot peut se révéler destructrice. L'une des jeunes filles se retrouve seule et part se mettre au vert à Montpellier : entre les monologues du gardien un poil efféminé et ses propres fantasmes, la jeune fille tente de retrouver la sourire. Mais la dépression guette...

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C'est forcément facile à dire et un peu téléphoné, mais il y a ici les racines d'un Brisseau déjà déterminé quant à sa conception de la vie/du cinéma, mêlant fraîcheur et noirceur, réalité duraille et fantasmes, sexe et fantaisie... On peut aussi bien assister au déhanchement d'une jeune fille effectuant un strip-tease sur du Dylan, qu'à une séquence d'amour rêvée avec sa copine ou ses géniteurs ; on pourrait y voir une façon frontale d'attaquer les problèmes - et ça l'est ; mais on a jamais l'impression d'assister en voyeur à des scènes de cul glauque : il s'agit juste pour Brisseau de mêler à l'image certaines émotions, qu'elles soient ressenties (la donzelle couchant avec son petit copain) ou simplement de l'ordre du spirituel ; il y a indéniablement déjà ici cette capacité chez Brisseau à entremêler finement les hauts et les bas de l'existence (une attirance, une envie, un sentiment de rejet) et les hauts et les bas psychologiques (de la masturbation à l'envie de mettre fin à sa vie - Eros et Thanatos once again). C'est vrai qu'on sent que Brisseau, en 1976, filme avec les moyens du bord (pas d'éclairage, des scènes que l'on devine tournées en une prise (ce qui plut forcément à Rohmer), une bande musicale pompée jusqu'à la lie) mais on est déjà face à un cinéma qui déborde de sincérité : un coté brut, pur et dur, aussi bien dans les scène de sexe sans tabou que dans la noirceur qui gagne peu à peu l'esprit de cette jeune fille en plein doute, sans repère, dérivant peu à peu dans sa solitude. Les dialogues sont parfois un peu maladroits, les acteurs (Brisseau en tête) pas d'une grâce infinie, mais on sent indiscutablement l'expression originale d'un cinéaste jouant avec les frontières entre la réalité et le "fantastique". Premier jet, frontal, désenchanté, mais avec une vraie patte.

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