Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Shangols
REALISATEURS
GODARD Jean-Luc 1 2
 
 
 

 
 
 
 
 
 
 
 
 
30 mars 2020

L'Oeil du Malin de Claude Chabrol - 1962

vlcsnap-2020-03-29-22h45m46s120

Chabrol a toujours aimé le ton froid et les objets glacés, et ça a même donné lieu à quelques-uns de ses meilleurs films (La Femme infidèle ou Juste avant la nuit, par exemple). L'Oeil du Malin est la preuve que ça peut aussi donner lieu à ses moins bons. Cette fois le style "nouveau roman" fait pshit, et ce film apparaît non seulement inutile dans sa filmographie, mais aussi raté dans tout ce qui fait l'intérêt du cinéma de Chabrol de ces années-là : trop sophistiqué, trop mal joué, trop bourgeois, le film se plante à tous les niveaux. Le sujet de départ, pourtant, semble écrit pour lui : un jeune bourgeois désoeuvré et isolé en Allemagne devient fasciné par un couple qui vit dans sa petite ville, couple formé par un écrivain allemand à succès et sa femme française : leur parfait amour finit par agacer, puis par obséder fortement le héros, qui va mettre son point d'honneur à saccager cet amour et plonger ce couple heureux dans le drame. Manipulation psychologique et jeux dangereux, entourloupes et pièges pervers, le tout sous les apparats de la haute bourgeoisie, nul autre que Chabrol ne semble être programmé pour ce genre de film.

vlcsnap-2020-03-29-21h11m42s985

Mais bien vite, le film accumule les mauvaises idées et gâche tout son potentiel scénaristique. Le gros point noir du film, ce sont ses interprètes : si Stéphane Audran est toujours aussi impeccable dans son jeu subtil et presque invisible, la partie masculine du casting est inregardable ; Walter Reyer parce qu'il cabotine à mort et réduit son personnage à une caricature de dolce vita périmée ; Jacques Charrier parce qu'il n'a aucun charisme et joue faux de bout en bout. Il eût fallu des acteurs troublants, ambigus, pour interpréter cette savante toile d'araignée de perversion et de faux-semblants ; ceux-ci sont inexistants. Chabrol ne s'en doute pas, qui sature son récit de voix off commentant chaque faits, alors que c'est justement l'opacité des objectifs de cet Albin Mercier qui fonctionne ; en expliquant tout, le film s'annule, devient illustratif, d'autant que même en off, Charrier surjoue lourdement. Lourdeur qui se retrouve dans l'écriture, très surlignée, qui accumule les scènes trop claires et attendues dans leur déroulement. Il n'y a que dans la mise en scène qu'on retrouve parfois le Chabrol qu'on aime, dans ce beau noir et blanc très froid, dans quelques idées de décors géométriques assez graphiques, dans le rythme lent qui laisse le temps aux personnages d'exister, dans les inspirations hitchcokiennes des scènes de filature à Munich, dans la jolie musique hermannienne. Mais le ton existentialiste va mal au teint de Chabrol, qui se vautre dans la perversion à deux balles dans ce film trop bourgeois pour toucher, trop bêtement sophistiqué pour convaincre, trop court pour séduire (on ne comprend rien aux motivations d'Albin par exemple, pourquoi veut-il à tout prix détruire ce couple ?). Gros ratage.

vlcsnap-2020-03-29-22h38m46s197

Commentaires
Derniers commentaires