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15 mai 2018

Voici le Temps des assassins de Julien Duvivier - 1956

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Que voilà du cinéma de papa tout poussiéreux et rongé aux mites... Duvivier, avec son pessimisme de temps en temps bienvenu, ses sujets parfois originaux et sa direction d'acteurs souvent juste, a pu, il est vrai, nous surprendre plus fréquemment qu'à son tour. Mais là, handicapé sûrement par un Gabin sans inspiration, il nous pond un scénario invraisemblable, très daté, range ses (petites) ambitions formelles au placard pour ne se consacrer qu'à sa capricieuse star, et se vautre joyeusement dans son casting tout bancal. On ne croit pas une seconde aux aléas de cette tramette de théâtre de faubourg, qui flirte avec le grand-guignol (la nana égorgée par le chien du type qu'elle a éliminé, c'est un poil trop, non ?) alors qu'elle ne raconte qu'une minuscule histoire de tromperie. Et puis voir Gabin, avec ses yeux qui roulent et ses tonnerres dans la voix, se faire abuser par Danielle Delorme et son charisme de flan aux oeufs, c'est un peu fort de café quand même.

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On apprécie au début la reconstitution croquignolette des Halles parisiennes. Il suffit que Gabin pointe son nez hors de sa boutique, se frotte les mains et se lance dans ses achats pour qu'on se retrouve plongé avec bonheur dans ces ambiances populo ; impression renforcée par les quelques séquences qui suivent, où on nous présente ce cuistot des quartiers populaires qui fraye avec les gens de la haute sans qu'on la lui fasse : André Chatelin est un excellent cuisinier, bougon mais humain, et sa petite troupe marche au pas. Son héritage est déjà pratiquement entendu : ce sera le jeune Gérard (Gérard Blain), fils putatif et brave garçon. Cette ambiance bon enfant, très joliment rendue par la mise en scène sans façon de Duvivier, va être subitement gâchée par l'arrivée de Catherine (Delorme) : d'abord gentille et innocente brebis, elle va s'avérer être la biatch de service, manipulée par sa droguée de mère (la suffisante Lucienne Bogaert), traitant comme marionnettes le petit Gérard et le vieillissant André pour en tirer tout le suc nécessaire. Cette salope va même fomenter l'assassinat du pauvre Gabin, qui n'y voit que du feu, fasciné par la frimousse de sa donzelle. Bon, on y croit comme au retour de la gauche, tout ça est d'un artificiel qui fait peine à voir, du contexte (une fois le décor planté, Duvivier en fait dix fois trop avec ses guinguettes et ses bords de Marne) aux personnages : la mère de Catherine est campée donc par Bogaert, dont on sent qu'elle s'est quand même peu renseignée sur les effets de la drogue et de la dépression chez les personnes du 3ème âge (elle est clownesque) ; celle de notre Jeannot est une sorcière SM armée d'un fouet, trouvaille ridicule à mettre sur le compte des excès nihilistes du cinéaste ; et les clients du restaurant sont tous des caricatures. Au milieu de ces seconds rôles pénibles, Gabin a du mal à construire un personnage, qui s'avère très fade hors ce qu'on sait de lui dans le scénario et qu'il ignore : il est manipulé. De toute façon, il a l'air de s'en carrer de la construction de personnage, se contentant d'encaisser son chèque en égrenant avec gourmandise ses menus alambiqués. A ce compte-là, nous on se carre un peu de son film.

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Commentaires
T
cette critique est vraiment débile : ce film est absolument génial : un ovni dans le cinéma français. On n'a rarement atteint ce degré de noirceur qui, désolé de vous l'apprendre, a existé et existe toujours dans la vie.
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F
Un peu facile de cracher sur le bon vieux noir franchouillard. Il n'y a pas si longtemps le boucher d'un Marché parisien a découpé sa maîtresse et le gosse de celle-ci avant de répartir les restes dans les poubelles municipales. Et les bords de Marne au pays des tricards n'ont pas trop changé avec les camps de réfugiés que sont les villes nouvelles alentour. Les années 50 ? "Des rues grises et des manteaux noirs", chante Gilbert Laffaille. Comme "Manèges" d'Yves Allégret, ce film sent si mauvais la (vieille) France que c'en est un régal.
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