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9 juillet 2015

LIVRE : Prendre Dates de Patrick Boucheron & Mathieu Riboulet - 2015

9782864328001,0-2640228Difficile de rendre compte exactement du mélange de stupéfaction, d'indignation et de flou artistique qui s'est emparé de la France au moment des attentats contre Charlie Hebdo de janvier dernier, difficile en tout cas sans tomber soit dans le béni-oui-oui soit dans la bête opposition au mouvement "Je suis Charlie". C'est pourquoi les auteurs de ce livre choisissent un angle intelligent : l'un est historien, et saura objectivement relater les faits, heure par heure, nous rappelant six mois après le déroulé de ces 8 folles journées (du 6 au 14 janvier) ; l'autre est écrivain, et est en charge de mettre des mots sur les émotions, d'humaniser le livre en quelque sorte pour tenter de trouver l'expression exacte de cette sensation collective complexe. Du coup, on plonge dans le bouquin en même temps avec le cerveau ouvert et le coeur aux aguets, c'est très bien. Avec finesse, Boucheron et Riboulet reviennent sur tout ce qui s'est passé, le flot d'images télévisées, la sensation étrange créée par la proximité géographique des tueurs, l'attachement presque familial envers ces dessinateurs, le mystère du mouvement de foule qui s'est déclenché de lui-même, les leçons tirées de cette subite solidarité mondiale. Mais les plus beaux passages sont sûrement les chapitres du début et de la fin. En faisant démarrer leur narration la veille des attentats, ils montrent une France avachie, ayant perdu tout sens de l'indignation, et qui se réveille brusquement le 7 janvier ; en la terminant quand tout est fini, ils s'interrogent sur le devenir de cette indignation collective, et on sent bien qu'ils ne voient pas forcément l'avenir en rose. L'essai se fait subtilement philosophique sur la fin, et propose quelques pistes pour que cette colère, ce refus, ne s'éteignent pas. Mais Prendre Dates est avant tout un livre nécessaire parce qu'il est une sorte de témoignage complet, concret et sentimental à la fois, qui fait oeuvre de recueillement collectif, qui permet aux lecteurs de communier une dernière fois en mémoire de tous ces morts (gloire aux auteurs, au passage, qui replacent les trois terroristes dans la liste des victimes des attentats), et qui restera comme une trace précieuse de ces bizarres journées. Histoire d'être encore "Charlie" pendant quelques heures.

Commentaires
L
Oui, à condition de mettre de côté toute notion de responsabilité.
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S
Oui, je voulais parler du lavage de cerveau qu'ont subi les tueurs en question, lavage de cerveau idéologique dont ils ont été, justement, les victimes au sens strict. Et l'abandon social des banlieues, sans faire de politique de comptoir, dont ils sont victimes également, est aussi une piste pour expliquer leurs actes ce jour-là. <br /> <br /> Bon, mais ne jouons pas sur les mots : TOUS les gens qui meurent dans un attentat sont des victimes de cet attentat, non ?
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L
Je suis désolé : j'y réfléchis et ça se défend mal. <br /> <br /> <br /> <br /> Le lavage de cerveau est ce qu'on fait subir à des personnes contre leur gré et l'abandon social comme cause me semble très hypothétique. A voir. <br /> <br /> <br /> <br /> Mais surtout : les auteurs des tueries ne peuvent pas être victimes de leurs propres attentats. C'est de la novlangue.
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G
D'une certaine façon, oui, Ludovic. Victimes, dans ce cas-là, de lavage de cerveau, d'abandon social, qui les a fait dévier de route. Ca se défend, non ?
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L
"gloire aux auteurs, au passage, qui replacent les trois terroristes dans la liste des victimes des attentats"<br /> <br /> <br /> <br /> Quelque chose m'échappe : meurtrier = victime ?
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